L'école des maris
Molière
丈夫学堂
莫里哀
ACTE III
Scène IX
ISABELLE, VALÈRE, LE COMMISSAIRE, LE NOTAIRE, ÉLISETTE, ERGASTE, LÉONOR, SGANARELLE, ARISTE.
ISABELLE
Ma soeur, je vous demande un généreux pardon,
Si de mes libertés j'ai taché votre nom.
Le pressant embarras d'une surprise extrême
M'a tantôt inspiré ce honteux stratagème :
Votre exemple condamne un tel emportement ;
Mais le sort nous traita nous deux diversement.
Pour vous, je ne veux point, Monsieur, vous faire excuse :
Je vous sers beaucoup plus que je ne vous abuse.
Le Ciel pour être joints ne nous fit pas tous deux :
Je me suis reconnue indigne de vos feux ;
Et j'ai bien mieux aimé me voir aux mains d'un autre,
Que ne pas mériter un cœur comme le vôtre.
VALÈRE
Pour moi, je mets ma gloire et mon bien souverain
À la pouvoir, Monsieur, tenir de votre main.
ARISTE
Mon frère, doucement il faut boire la chose :
D'une telle action vos procédés sont cause ;
Et je vois votre sort malheureux à ce point,
Que, vous sachant dupé, l'on ne vous plaindra point.
LISETTE
Par ma foi, je lui sais bon gré de cette affaire,
Et ce prix de ses soins est un trait exemplaire.
LÉONOR
Je ne sais si ce trait se doit faire estimer ;
Mais je sais bien qu'au moins je ne le puis blâmer.
ERGASTE
Au sort d'être cocu son ascendant l'expose,
Et ne l'être qu'en herbe est pour lui douce chose.
SGANARELLE
Non, je ne puis sortir de mon étonnement ;
Cette ruse d'enfer confond mon jugement ;
Et je ne pense pas que Satan en personne
Puisse être si méchant qu'une telle friponne.
J'aurais pour elle au feu mis la main que voilà :
Malheureux qui se fie à femme après cela !
La meilleure est toujours en malice féconde ;
C'est un sexe engendré pour damner tout le monde.
Je renonce à jamais à ce sexe trompeur,
Et je le donne tout au diable de bon cœur.
ERGASTE
Bon.
ARISTE
Allons tous chez moi. Venez, Seigneur Valère.
Nous tâcherons demain d'apaiser sa colère.
LISETTE
Vous, si vous connaissez des maris loups-garous,
Envoyez-les au moins à l'école chez nous.