【Emile Zola】Le Ventre de Paris III (77)
Mais Charvet se trouvait très piqué de cet avantage.
– Cayenne, Cayenne, murmurait-il entre ses dents, on n’y était pas si mal
que ça, après tout !
Et il tentait de prouver que l’exil n’est rien, que la grande souffrance
consiste à rester dans son pays opprimé, la bouche bâillonnée, en face
du despotisme triomphant. Si, d’ailleurs, on ne l’avait pas arrêté, au 2
décembre, ce n’était pas sa faute. Il laissait même entendre que ceux
qui se font prendre sont des imbéciles. Cette jalousie sourde en fit
l’adversaire systématique de Florent. Les discussions finissaient toujours
par se circonscrire entre eux deux. Et ils parlaient encore pendant des heures,
au milieu du silence des autres, sans que jamais l’un deux se confessât battu.
Une des questions les plus caressées était celle de la réorganisation du
pays, au lendemain de la victoire.
– Nous sommes vainqueurs, n’est-ce pas ?… commençait Gavard.
Et, le triomphe une fois bien entendu, chacun donnait son avis. Il y avait
deux camps. Charvet, qui professait l’hébertisme, avait avec lui Logre et
Robine. Florent, toujours perdu dans son rêve humanitaire, se prétendait
socialiste et s’appuyait sur Alexandre et sur Lacaille. Quant à Gavard,
il ne répugnait pas aux idées violentes ; mais, comme on lui reprochait
quelquefois sa fortune, avec d’aigres plaisanteries qui l’émotionnaient, il
était communiste.
Mais Charvet se trouvait très piqué de cet avantage.
– Cayenne, Cayenne, murmurait-il entre ses dents, on n’y était pas si mal
que ça, après tout !
Et il tentait de prouver que l’exil n’est rien, que la grande souffrance
consiste à rester dans son pays opprimé, la bouche bâillonnée, en face
du despotisme triomphant. Si, d’ailleurs, on ne l’avait pas arrêté, au 2
décembre, ce n’était pas sa faute. Il laissait même entendre que ceux
qui se font prendre sont des imbéciles. Cette jalousie sourde en fit
l’adversaire systématique de Florent. Les discussions finissaient toujours
par se circonscrire entre eux deux. Et ils parlaient encore pendant des heures,
au milieu du silence des autres, sans que jamais l’un deux se confessât battu.
Une des questions les plus caressées était celle de la réorganisation du
pays, au lendemain de la victoire.
– Nous sommes vainqueurs, n’est-ce pas ?… commençait Gavard.
Et, le triomphe une fois bien entendu, chacun donnait son avis. Il y avait
deux camps. Charvet, qui professait l’hébertisme, avait avec lui Logre et
Robine. Florent, toujours perdu dans son rêve humanitaire, se prétendait
socialiste et s’appuyait sur Alexandre et sur Lacaille. Quant à Gavard,
il ne répugnait pas aux idées violentes ; mais, comme on lui reprochait
quelquefois sa fortune, avec d’aigres plaisanteries qui l’émotionnaient, il
était communiste.