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【法语阅读——驴皮记】La peau de chagrin(1.59)
日期:2012-09-10 15:11  点击:528


 【法语阅读——驴皮记】La peau de chagrin(1.59)

 

     Ces phrases furent prononcées d'une voix douce et mélodieuse par la plus innocente, la plus jolie et la plus gentille petite créature qui sous la baguette d'une fée fût jamais sortie d'un oeuf enchanté. Elle était arrivée à pas muets, et montrait une figure délicate, une taille grêle, des yeux bleus ravissants de modestie, des tempes fraîches et pures. Une naïade ingénue, qui s'échappe de sa source, n'est pas plus timide, plus blanche ni plus naïve que cette jeune fille qui paraissait avoir seize ans, ignorer le mal, ignorer l'amour, ne pas connaître les orages de la vie, et venir d'une église où elle aurait prié les anges d'obtenir avant le temps son rappel dans les cieux. A Paris seulement se rencontrent ces créatures au visage candide qui cachent la dépravation la plus profonde, les vices les plus raffinés, sous un front aussi doux, aussi tendre que la fleur d'une marguerite. Trompés d'abord par les célestes promesses écrites dans les suaves attraits de cette jeune fille, Emile et Raphaël acceptèrent le café qu'elle leur versa dans les tasses présentées par Aquilina, et se mirent à la questionner. Elle acheva de transfigurer aux yeux des deux poètes, par une sinistre allégorie, je ne sais quelle face de la vie humaine, en opposant à l'expression rude et passionnée de son imposante compagne le portrait de cette corruption froide, voluptueusement cruelle, assez étourdie pour commettre un crime, assez forte pour en rire ; espèce de démon sans coeur, qui punit les âmes riches et tendres de ressentir les émotions dont il est privé, qui trouve toujours une grimace d'amour à vendre, des larmes pour le convoi de sa victime, et de la joie le soir pour en lire le testament. Un poète eût admiré la belle Aquilina ; le monde entier devait fuir la touchante Euphrasie : l'une était l'âme du vice, l'autre le vice sans âme.
     - Je voudrais bien savoir, dit Emile à cette jolie créature, si parfois tu songes à l'avenir.
     - L'avenir ! répondit-elle en riant. Qu'appelez-vous l'avenir ? Pourquoi penserais-je à ce qui n'existe pas encore ? je ne regarde jamais ni en arrière ni en avant de moi. N'est-ce pas déjà trop que de m'occuper d'une journée à la fois ? D'ailleurs, l'avenir, nous le connaissons, c'est l'hôpital.
     - Comment peux-tu voir d'ici l'hôpital et ne pas éviter d'y aller ? s'écria Raphaël.
    - Qu'a donc l'hôpital de si effrayant ? demanda la terrible Aquilina. Quand nous ne sommes ni mères ni épouses, quand la vieillesse nous met des bas noirs aux jambes et des rides au front, flétrit tout ce qu'il y a de femme en nous et sèche la joie dans les regards de nos amis, de quoi pourrions-nous avoir besoin ? Vous ne voyez plus alors en nous, de notre parure, que sa fange primitive qui marche sur deux pattes, froide, sèche, décomposée, et va produisant un bruissement de feuilles mortes. Les plus jolis chiffons nous deviennent des haillons, l'ambre qui réjouissait le boudoir prend une odeur de mort et sent le squelette ; puis, s'il se trouve un coeur dans cette boue, vous y insultez tous, vous ne nous permettez même pas un souvenir. Ainsi, que nous soyons, à cette époque de la vie, dans un riche hôtel à soigner des chiens, ou dans un hôpital à trier des guenilles, notre existence n'est-elle pas exactement la même ? Cacher nos cheveux blancs sous un mouchoir à carreaux rouges et bleus ou sous des dentelles, balayer les rues avec du bouleau ou les marches des Tuileries avec du satin, être assises à des foyers dorés ou nous chauffer à des cendres dans un pot de terre rouge, assister au spectacle de la Grève, ou aller à l'Opéra, y a-t-il donc là tant de différence ?
     - Aquilina mia, jamais tu n'as eu tant de raison au milieu des tes désespoirs, reprit Euphrasie. Oui, les cachemires, les vélins, les parfums, l'or, la soie, le luxe, tout ce qui brille, tout ce qui plaît ne va bien qu'à la jeunesse. Le temps seul pourrait avoir raison contre nos folies, mais le bonheur nous absout. Vous riez de ce que je dis, s'écria-t-elle en lançant un sourire venimeux aux deux amis ; n'ai-je pas raison ? J'aime mieux mourir de plaisir que de maladie. je n'ai ni la manie de la perpétuité ni grand respect pour l'espèce humaine à voir ce que Dieu en fait ! Donnez-moi des millions, je les mangerai ; je ne voudrais pas garder un centime pour l'année prochaine. Vivre pour plaire et régner, tel est l'arrêt que prononce chaque battement de mon coeur. La société m'approuve ; ne fournit-elle pas sans cesse à mes dissipations ? Pourquoi le bon Dieu me fait-il tous les matins la rente de ce que je dépense tous les soirs ? pourquoi nous bâtissez-vous des hôpitaux ? Comme il ne nous a pas mis entre le bien et le mal pour choisir ce qui nous blesse ou nous ennuie, je serais bien sotte de ne pas m'amuser.

  这些话是一个最纯洁、最美丽、最可爱的娇小姑娘用又温柔又悦耳的声音说出来的,像这样的人儿,只能说是传说中的仙姑用魔棒一指便从一只魔蛋里跳出来的。她悄悄地走来,露出一张细致的面孔,蓝色的眼睛娇柔可爱,鬓角明净,身材窈窕。一个从清泉中逃出来的纯洁的水仙女也不比这少女更羞怯,更洁白,更天真的了,她似乎只有十六岁,还不知道罪恶,不懂得爱情,未经历过人生的风波,她来自一座教堂,她似乎曾在教堂中祈求过天使,请求准许提前把她召回天国。只有在巴黎才能遇到这类女人;她们外表天真无邪,她们的前额象雏菊般温柔、娇艳,却隐藏着最深刻的堕落,最精细的滢佚。这位少女温雅的容貌所流露的那种高贵姿质,一开始就使爱弥尔和拉法埃尔上了当,他们接受了她斟在铜子里的由阿姬莉娜用银托盘端过来的咖啡,并开始向她问这问那。后来她以一种可怕的比拟,那就是以一种自甘堕落的,滢荡而残忍的,鲁莽得足以犯罪,又坚强得足以讥笑罪行的姿态,去和她壮健的同伴那种粗鲁而热情的表情作对比;她是一个没心肝的魔鬼,以自己的无情去惩罚那些多情善感的人,她总有办法装模作样来出卖爱情和有本领在她的牺牲者的出殡行列中挤出几滴眼泪,然后,在夜里怀着快乐的心情去读她的牺牲者留下的遗嘱。我也不知道这是人类生活的哪个侧面,这一来,她的形象便在两位诗人的眼中发生了变化。一位诗人也许会欣赏漂亮的阿姬莉娜;而全世界都应该躲避迷人的欧弗拉齐:因为前者是淫邪的化身,后者是没有灵魂的淫妇。
  “我很想知道你有时是否也想到自己的前途,”爱弥尔问这位漂亮的姑娘。
  “我的前途吗?”她笑着回答,“你说什么叫前途?我为什么要为还不存在的事情去躁心?我从来就不瞻前顾后,先照顾目前不是已经够我忙坏了吗?再说,前途嘛,我们是知道的,那就是救济院。”
  “你怎么现在就想到进救济院,而不设法避免将来进那种地方?”拉法埃尔嚷着说。
  “难道救济院真是那么可怕?”阿姬莉娜板着面孔问道,“我们既不是母亲又不是妻子,当老年让我们脚上穿上黑色的袜子,额上长满皱纹,使我们身上一切女性的特征都已萎缩,使朋友们见到我们时,在他们的眼里没有了欢乐的神情,试问我们还能有什么需要?那时候,你们从我们的穿戴上会只看到我们原来的卑贱相,寒伧、干瘪、不成格局,两条瘦腿走起路来,发出踩在枯叶上的声音。最美丽的布帛穿在我们身上都会变成褴褛,从前使梳妆室里馨香扑鼻的龙涎香,现在却发出死人的臭味,让人闻到骸骨的气息;再说,在这种卑贱的处境中,万一还有一颗良心,你们就会一起来侮辱它。你们甚至不让我们留下一个纪念品。因此,当我们到达了人生的这个阶段,无论是住在豪华的府邸里养狗,还是在救济院里挑选破布片,我们的生活难道不都是一样吗?用红蓝方格子粗布头巾或用挑花细纱头巾遮盖我们的白发,用扫帚打扫街道或用绸缎拖布擦拭杜伊勒里宫的石阶,坐在镀金的壁炉前烤火或坐在红土火盆前取暖,去沙滩广场看杀人和到歌剧院观剧,难道真有那么大的差别吗?”
  “我的阿姬莉娜,你在种种失望之中,可从来没有说过这么多有道理的话,”欧弗拉齐接着说,“是的,细绒料子,小牛皮货,香料,黄金,奢侈品,一切发光的东西,所有逗人喜爱的什物,都只适宜于青春时代享用。只有时间能够克服我们的疯狂行为,但是,幸福却饶了我们——你们嘲笑我说的话,”她对两位朋友毒辣地微笑一下,嚷道,“难道我说的不对吗?我宁愿为享乐而丧生,却不想因生病而死亡。看到上帝的种种做法,我既无永生的奢望,也没对人类有多大的敬意!请给我几百万法郎,我将把它们花得精光;连一个铜子我也不想留给明年。活着是为了享受和支配。这是我的心每次跳动时向我宣告的决定。社会也在支持我;它不是不断地提供我挥霍的费用吗?为什么仁慈的上帝每天早上都把我每天晚上该花的钱如数给了我?为什么你们要给我们设立救济院?既然上帝不把我们放在善和恶之间,让我们选择使我们感到不快或烦恼的东西,而我不去寻欢作乐,就未免太傻了。”


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