中法对照:羊脂球 BOULE DE SUIF (11)
Maupassant 莫泊桑
La nuit tombait, l'obscurité peu à peu devint profonde, et le froid, plus sensible pendant les digestions, faisait frissonner Boule de suif, malgré sa graisse. Alors Mme de Bréville lui proposa sa chaufferette dont le charbon, depuis le matin, avait été plusieurs fois renouvelé, et l'autre accepta tout de suite car elle se sentait les pieds gelés. Mme Carré-Lamadon et Loiseau donnèrent les leurs aux religieuses.
Le cocher avait allumé ses lanternes. Elles éclairaient d'une lueur vive un nuage de buée au-dessus de la croupe en sueur des timoniers, et, des deux côtés de la route, la neige qui semblait se dérouler sous le reflet mobile des lumières.
On ne distinguait plus rien dans la voiture; mais tout à coup un mouvement se fit entre Boule de suif et Cornudet; et Loiseau, dont l'oeil fouillait l'ombre, crut voir l'homme à la grande barbe s'écarter vivement comme s'il eût reçu quelque bon coup lancé sans bruit.
Des petits points de feu parurent en avant sur la route. C'était Tôtes. On avait marché onze heures, ce qui, avec les deux heures de repos laissées en quatre fois aux chevaux pour manger l'avoine et souffler, faisait quatorze. On entra dans le bourg, et devant l'hôtel du Commerce on s'arrêta.
La portière s'ouvrit. Un bruit bien connu fit tressaillir tous les voyageurs: c'étaient les heurts d'un fourreau de sabre sur le sol. Aussitôt la voix d'un Allemand cria quelque chose.
Bien que la diligence fût immobile, personne ne descendait, comme si l'on se fût attendu à être massacré à la sortie. Alors le conducteur apparut, tenant à la main une de ses lanternes, qui éclaira subitement jusqu'au fond de la voiture les deux rangs de têtes effarées, dont les bouches étaient ouvertes et les yeux écarquillés de surprise et d'épouvante.
A côté du cocher se tenait, en pleine lumière, un officier allemand, un grand jeune homme excessivement mince et blond, serré dans son uniforme comme une fille en son corset, et portant sur le côté sa casquette plate et cirée qui le faisait ressembler au chasseur d'un hôtel anglais. Sa moustache démesurée, à longs poils droits, s'amincissant indéfiniment de chaque côté et terminée par un seul fil blond, si mince qu'on n'en apercevait pas la fin, semblait peser sur les coins de sa bouche, et, tirant la joue, imprimait aux lèvres un pli tombant.
Il invita en français d'Alsacien les voyageurs à sortir, disant d'un ton raide: "Foulez-vous descendre, Messieurs et Dames?"
Les deux bonnes soeurs obéirent les premières avec une docilité de saintes filles habituées à toutes les soumissions. Le comte et la comtesse parurent ensuite, suivis du manufacturier et de sa femme, puis de Loiseau poussant devant lui sa grande moitié. Celui-ci, en mettant pied à terre, dit à l'officier: "Bonjour, Monsieur", par un sentiment de prudence bien plus que de politesse. L'autre, insolent comme les gens tout-puissants, le regarda sans répondre.
Boule de suif et Cornudet, bien que près de la portière, descendirent les derniers, graves et hautains devant l'ennemi. La grosse fille tâchait de se dominer et d'être calme: le démoc tourmentait d'une main tragique et un peu tremblante sa longue barbe roussâtre. Ils voulaient garder de la dignité, comprenant qu'en ces rencontres-là chacun représente un peu son pays; et, pareillement révoltés par la souplesse de leurs compagnons, elle tâchait de se montrer plus fière que ses voisines, les femmes honnêtes, tandis que lui, sentant bien qu'il devait l'exemple, continuait en toute son attitude sa mission de résistance commencée au défoncement des routes.
夜色下来了,黑暗渐渐变成了深沉的,寒气在人消化食物的时候是更其使人觉得的,羊脂球尽管富于脂肪,寒气也有些使得她发噤,于是卜来韦夫人把自己的袖珍手炉送给她用,那里边的炭从早上到现在已经换了好几回,羊脂球立刻接受了这种好意,因为她觉得自己的脚冻木了。迦来-辣马东夫人和鸟夫人把她俩的借给了两个嬷嬷。
赶车的点燃了车外的风灯。灯光是明亮而闪动的,照见辕子两边的牲口臀部的汗气像云气一样飘浮;大路两边的雪仿佛在移动的亮光底下伸展。
车子里什么也分辨不出来了,不过在羊脂球和戈尔弩兑中间忽然起了一种动作;鸟老板的眼睛正在暗中窥探,他相信看见那个大胡子突然向旁一偏,如同沉重地接受了什么没有声音的打击。
前面的大路上出现一星一星的灯火了。那就是多忒镇。他们走了11小时,再加牲口在路上吃了四次草料休息了两小时,一共就是13小时了。车子开到了镇上,在招商旅馆的门口歇下来。
车门开了!一阵听惯了的声音教所有的旅客感到心惊肉跳;那正是军刀鞘子接接连接撞着路面。立刻就有一个日耳曼人的声音嚷着几句话。
车子虽然停了,不过谁也没有下来,仿佛正有人等着旅客一下车就来屠杀。这时候,赶车的出面了,他从车外取下一盏风灯拿着向车里一照,登时照明了车子内部那两行神色张皇的脸儿,因为惊惧交集,眼睛都是睁大的,嘴巴全是张开的。
在赶车的旁边,灯光当中站着一个日耳曼军官,一个非常之瘦的长个儿青年人,头发是金黄的,军服紧紧地缚着他的腰身仿佛是一个女孩子缚着腰甲,平顶的漆皮军帽歪歪地偏向一边,使人觉得他很像一家英国旅馆里的小使。他两撇长得过度的髭须直挺挺地翘起,不断地向上收束,最后只有一茎金黄色的毫毛,纤细得教人望不见它的杪末,那像是压着他的嘴角儿,牵着他的腮帮子,在嘴唇上印出一道下坠的折纹。
他用阿尔萨斯口音的法语请旅客们下车,用一道生硬的语气说:“各位可愿意下车,先生们和夫人们!”
两个嬷嬷用那种惯于听受一切征服力的圣女式的柔顺态度首先表示了服从,接着下车的是伯爵两夫妇,而厂长两夫妇跟在他们后边,随后才是鸟老板推着他那个高大的老婆在他头里走。他的一只脚刚着地,就用一种谨慎超于礼貌的情感向军官说了一声:“先生你好。”另一个却倨傲得像是能力万全的人一般望着鸟老板没有答礼。
羊脂球和戈尔弩兑尽管本来都坐在门口边,下车却在最后,而且在敌人跟前显得又稳重又高傲。胖姑娘极力镇定自己,使自己显得安详,民主朋友用一只具有悲剧意味而且略略发抖的手捋着自己的火红长胡子。他和她都懂得在这种遭遇中间每一个人多少代表着祖国,所以都愿意保持一点庄严态度;并且同样都因为他们同车的旅伴们的软弱样子而发生反感,所以她极力显出自己比她那些女旅伴,那些顾爱名誉的妇人来得自负,他呢,觉得应当以身作则,在整个态度上继续他那种已经由破坏大路开始了的抗敌使命。