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CHAPTER XVIII

时间:2020-10-06来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Cet insuccs suffitgurir Anatole de son ambition. Il se tourna vers d'autres ides, vers un dsir plus modeste et de ralisa
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 Cet insuccès suffit à guérir Anatole de son ambition. Il se tourna vers d'autres idées, vers un désir plus modeste et de réalisation plus facile: il voulut avoir un atelier qui lui donnerait le chez lui de l'artiste, la possibilité de faire des portraits, de gagner de l'argent; en un mot, s'établir peintre.
 
Malheureusement sa mère n'était pas disposée à lui payer le luxe d'un atelier. A la fin, elle se décida à aller consulter Langibout, qui l'assura «que les belles choses pouvaient se faire dans une cave». Armée de cette réponse, elle se refusa décidément à la fantaisie d'Anatole. Cela finit par une scène vive, à la suite de laquelle Anatole remonta fièrement dans sa chambre au sixième, en déclarant qu'il ne prendrait plus ses repas à la maison, et qu'il allait vivre de son talent.
 
Il vécut à peu près un mois de dessins de têtes d'Espagnoles pastellées, les cheveux fleuris de fleurs de grenadier, qu'il vendait à un petit marchand de la rue Notre-Dame-de-Recouvrance. Tout ce mois, il passa et repassa devant un numéro de la rue Lafayette, devant l'écriteau d'un petit atelier à louer, le seul atelier du quartier où Hillemacher n'avait pas encore fait bâtir ces huit grands ateliers qui firent plus tard de la rue un des camps de la peinture de la rive droite.
 
L'embarras était qu'il fallait une apparence de meubles pour entrer là-dedans; et Anatole gagnait à peine de quoi dîner tous les jours. Le plus souvent, il était nourri par un camarade de l'atelier, avec lequel il compagnonnait; un brave garçon pris par la conscription, et qu'une recommandation d'Horace Vernet avait fait mettre dans la réserve, et placer parmi les infirmiers du Val-de-Grâce, «les canonniers de la seringue.» De la caserne, il apportait à Anatole la moitié de sa ration dans son shako. Cela n'entamait en rien la fermeté de résolution d'Anatole, qui continuait à passer tous les jours par l'escalier de service devant la porte de la cuisine entr'ouverte de sa mère, sans y entrer, avec l'air de mépriser, du haut d'un estomac plein, l'odeur du déjeuner.
 
Là-dessus, il entendit parler d'un monsieur de province qui cherchait quelqu'un pour lui faire des personnages dans une lithographie. Il demanda l'adresse, et courut à un petit hôtel de la rue du Helder.
 
—Entrez!—lui cria une voix formidable quand il eut frappé à la porte indiquée. Il se trouva en face d'un Hercule, énormément nu, et tout occupé à faire des ablutions froides.
 
L'homme ne se dérangea pas; il continua à faire jouer ses membres de lutteur, des muscles féroces, en roulant de gros yeux dans sa grosse tête à barbe dure.
 
—Proférez des sons,—dit-il à Anatole interdit. Et quand Anatole eut expliqué le motif de sa visite:—Ah! vous savez faire la lithographie, vous?
 
—Parfaitement,—dit intrépidement Anatole, qui n'avait jamais touché de sa vie un crayon lithograhique.
 
—Où demeurez-vous?
 
—Rue du Faubourg-Poissonnière, no 31.
 
—Garçon!—cria l'homme en se rhabillant à un domestique de l'hôtel, qu'on entendait remuer dans la chambre à côté,—fermez ma malle, et un commissionnaire…
 
Anatole ne comprenait pas; mais il sentait une vague terreur brouillée lui monter dans les idées, devant cet homme inquiétant par sa force et ses espèces de manières de fou.
 
—Partons!—dit brusquement l'homme tout à fait rhabillé.
 
Anatole descendit l'escalier, suivi par le commissionnaire, par la malle, et par l'homme portant sous le bras une immense pierre, concentré, sinistre, muet et caverneux, avec l'air de rouler sous ses épais sourcils froncés des méditations farouches. Il avait l'impression d'un cauchemar, d'une aventure menaçante, et, par-dessus tout, un poignant sentiment de honte. L'idée était horrible pour lui d'introduire cet étranger dans son taudis. S'il ne lui avait pas donné son adresse, il se serait sauvé à un tournant de rue.
 
Quand le commissionnaire eut enfourné avec peine la grande malle dans la petite chambre, et que la pierre fut posée sur la table qu'elle couvrit, l'homme, après avoir mesuré de l'œil la hauteur et la largeur de la mansarde, posa sa large main sur la couverture, et dit ces simples mots:—C'est votre lit, n'est-ce pas? Bon, je vais me coucher.
 
Anatole était tout à fait ahuri. Cependant, il commençait à préparer dans sa tête une timide demande d'explication, quand l'homme tira de sa poche quatre ou cinq cents francs qu'il posa sur la table de nuit.
 
Anatole vit dans cet or un éblouissement: son futur atelier! Il ne dit pas un mot.
 
L'homme s'était couché; tout à coup, sortant à moitié du lit, et se dressant sur son séant:—Au fait, vous ne mangeriez pas quelque chose, vous n'avez pas faim?
 
—Si,—dit Anatole,—j'ai oublié de déjeuner ce matin.
 
—Eh bien! faites monter quelque chose du restaurant.
 
Après le déjeuner, où l'homme ne parla pas à Anatole, et où Anatole n'osa pas lui parler:
 
—Vous me réveillerez à dix heures,—dit l'homme en se recouchant.—Vous entendez, à dix heures!
 
Il était une heure. Anatole alla se promener. Toutes sortes d'imaginations lui tournoyaient dans la cervelle. Des histoires de fous dangereux qu'il avait lues lui revenaient. Il ne savait que penser, que croire de ce prodigieux garnisaire installé chez lui, tombé de la lune dans ses draps.
 
A dix heures, il réveilla le dormeur qui s'habilla et se mit à découvrir, avec toutes sortes de précautions, la pierre sur laquelle on ne voyait que l'indication d'un arc de triomphe, de ce caractère alhambresque qui est le style spécial de la pâtisserie: là-dessous devait être représentée la réception du duc d'Orléans par la garde nationale de Saint-Omer, avec les portraits exacts de tous les gardes nationaux, exécutés d'après de mauvais daguerréotypes contenus dans la malle de leur compatriote.
 
—Hein? nous allons nous y mettre?—fit l'homme après avoir donné à Anatole toutes les explications du sujet.
 
—Nous y mettre? Mais je n'ai pas l'habitude de travailler la nuit.
 
—Tiens?… Ah! bien, très-bien… Vous coucherez dans le lit, la nuit… moi le jour… Nous nous relayerons.
 
Au bout de douze jours de ce singulier travail, la pierre était finie. L'artiste-amateur de Saint-Omer repartit pour son pays, laissant à Anatole cent vingt-cinq francs, l'estomac refait et réélargi, et le souvenir d'un original très brave homme qui n'avait trouvé que ce bizarre moyen pour obtenir vite d'un collaborateur ce qu'il voulait, comme il le voulait.
 
La malle du Saint-Omérois n'était pas au bout de la rue, qu'Anatole sautait rue Lafayette; il retenait le petit atelier. De là il courait chez un brocanteur qui, pour soixante-dix francs, lui vendait un chiffonnier et quatre fauteuils en velours d'Utrecht. A ce superflu, Anatole ajoutait le lit et la table de sa chambre. C'était de quoi répondre d'un terme pour un loyer de cent soixante francs. Et il entrait dans son premier atelier avec cinquante francs d'avance, de quoi vivre tout un mois, trente jours à n'avoir pas besoin de la Providence.
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