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CHAPITRE XIX UN NOUVEAU SOUPÇON(1)

时间:2023-10-07来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:CHAPITRE XIXUN NOUVEAU SOUPÇONNous ne pmes en dire davantage :cet instant, le Dr Reilly entra.Le mdecin et le dte
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CHAPITRE XIX

UN NOUVEAU SOUPÇON

Nous ne pûmes en dire davantage : à cet instant, le Dr Reilly entra.

Le médecin et le détective s’engagèrent dans une discussion d’ordre plus ou

moins médical sur l’état psychologique et mental d’un auteur de lettres

anonymes. Le Dr Reilly cita quelques cas rencontrés dans l’exercice de sa

profession et M. Poirot raconta plusieurs affaires de ce genre qu’il avait dû

démêler.

— C’est moins simple qu’on ne le croit habituellement, acheva-t-il. Le

coupable agit par besoin de domination, ou encore sous l’influence d’un

complexe d’infériorité.

Le Dr Reilly approuva.

— Voilà pourquoi l’auteur de lettres anonymes est souvent la personne que

l’on soupçonne le moins : par exemple, une petite fille inoffensive à qui l’on

donnerait le bon Dieu sans confession, arborant toutes les apparences de la

douceur et de la résignation chrétiennes, mais consumée intérieurement d’une

flamme infernale.

— Insinueriez-vous par-là que Mrs Leidner souffrait d’un complexe

d’infériorité ?

Le Dr Reilly vida sa pipe en ricanant.

— C’était la dernière femme sur terre à qui j’eusse attribué cette faiblesse :

chez elle, aucune contrainte ! De la vie, encore de la vie et toujours de la vie !

Voilà ce qu’elle cherchait et obtenait.

— Psychologiquement parlant, aurait-elle, selon vous, pu écrire ces lettres ?

— Je le crois. Mais si elle l’a fait, c’était dans le dessein de se poser en

héroïne de tragédie. Dans le privé, Mrs Leidner se considérait un peu comme une

star de cinéma. Il lui fallait constamment se tenir au premier plan… sous le feu

des projecteurs. Suivant la loi des contrastes, elle épousa le Dr Leidner, l’homme

le plus tranquille et le plus modeste de ma connaissance. Il l’adorait… mais

l’adoration au coin du feu ne suffisait point à sa femme ; elle voulait, de surcroît,

jouer le rôle de l’héroïne persécutée.

— Autrement dit, prononça Poirot en souriant, vous rejetez l’hypothèse du

mari selon laquelle la femme aurait écrit elle-même ces lettres dans un état de

somnambulisme ?

— Ah ! non, mais il m’était difficile de contredire un homme venant de

perdre une épouse bien-aimée et de lui jeter à la face que cette femme n’était

qu’une vulgaire menteuse et qu’elle avait failli le faire devenir fou d’inquiétude

pour satisfaire ses instincts de comédienne. Il serait en effet imprudent de révéler

à un mari la vérité sur les agissements de sa femme ! Le plus drôle, c’est que je

n’hésiterais nullement à dénoncer les torts du mari devant une épouse. Une

femme reconnaît volontiers qu’un homme est un propre à rien, un escroc, un

opiomane, un coquin et même un ignoble pourceau sans que pour autant ces

accusations diminuent d’un iota son affection envers le coupable. Les femmes

sont des réalistes en diable !

— Franchement, docteur Reilly, quelle est votre opinion sur Mrs Leidner ?

Le médecin se rejeta sur le dossier de sa chaise et, lentement, tira sur sa pipe.

— Franchement… votre question m’embarrasse. Je connaissais trop peu

cette femme. Elle avait un charme incontestable, beaucoup d’intelligence et de

compréhension. Quoi encore ? Ni sensuelle, ni paresseuse, ni vaniteuse, elle

n’était pas entachée des vices ordinaires à son sexe. Je l’ai toujours prise (sans

aucune preuve, du reste) pour une fieffée menteuse. Je me demande si elle

mentait à elle-même ou aux autres. J’ai personnellement un faible pour les

menteuses. Pour moi, une femme qui ne ment jamais est un être dépourvu

d’imagination et de sensibilité. Je ne crois pas qu’elle courait après les hommes…

elle prenait plutôt plaisir à les réduire à sa merci. Si vous abordiez ce sujet devant

ma fille…

— Nous avons déjà eu cet avantage, répondit Poirot, en esquissant un

sourire.

— H’m ! s’exclama le Dr Reilly. Elle n’a pas perdu de temps ! Elle n’a pas

dû l’épargner, j’imagine ! La jeune génération n’a aucun respect envers les morts.

À cheval sur les principes, elle condamne sans appel la moralité de ses aînés et

érige pour elle-même un code très élastique. Si Mrs Leidner avait entretenu une

douzaine d’intrigues, Sheila l’eût approuvée de « vivre sa vie » ou « d’obéir à sa

nature ». Mais ma fille ne voyait pas que Mrs Leidner suivait, en réalité, son

tempérament. Le chat obéit à son instinct quand il joue avec la souris. Il est ainsi

fait. Les hommes ne sont pas des gamins qu’il faille protéger contre les ruses

féminines. Tôt ou tard, ils rencontreront des femmes, certaines au caractère félin,

d’autres fidèles comme des épagneuls, d’autres encore, perruches autoritaires et

braillardes, qui ne leur accorderont pas une minute de répit ! La vie est un champ

de bataille… et non une partie de plaisir. J’aimerais à voir Sheila descendre de ses

grands chevaux et admettre, en toute franchise, qu’elle haïssait Mrs Leidner pour

des raisons toutes personnelles. Sheila, la seule jeune fille de l’endroit, se figure

que tous les jeunes hommes doivent tomber à ses pieds. Elle est naturellement

humiliée de constater qu’une femme d’âge mûr et comptant deux maris à son

actif se mette sur les rangs et la batte sur son propre terrain. Sheila est, au

demeurant, une charmante fillette, débordante de santé et, disons-le, assez jolie et

séduisante. Mais Mrs Leidner sortait de l’ordinaire : elle possédait cette beauté

fatale qui conquiert le cœur de tous les hommes… telle une belle dame sans

merci.

Je sursautai sur mon siège. Quelle coïncidence ! Le jeune Coleman n’avait-il

pas lui-même fait cette comparaison ?

— Si je ne suis pas indiscret, votre fille éprouve peut-être quelque tendresse

pour un des jeunes gens de l’expédition ?

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