Jamais on ne vit ciel plus bleu,
Air plus doux, nuits plus admirables,
Qu'en ces temps de sang et de feu.
Au milieu des guerres civiles,
Au plus fort des combats de juin,
Quand on fusillait des mobiles
Aux barreaux des marchands de vin;
Quand on jetait par les fenêtres
Des bouteilles de vitriol,—
Toujours résonnaient dans les hêtres
Les poëmes du rossignol;
Chaque soir, la lune coquette
Se mirait dans le lac plissé,
Comme ferait une grisette
Dans un coin de miroir cassé;
Car c'est le temps des jeunes brises,
Le temps où tout chante, où tout plaît,
Où Rousseau jetait des cerises
A mademoiselle Galley;
Où plus d'un de nous s'achemine,
La cravate un peu de côté,
Seul, vers la rivière voisine,
Pour prendre un bain d'éternité.