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CHAPITRE XIV UN DE NOUS ?(1)

时间:2023-10-07来源:互联网 进入法语论坛
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CHAPITRE XIV

UN DE NOUS ?

Une légère pause… au cours de laquelle sembla déferler dans la pièce une

vague d’horreur.

Pour la première fois à ce moment, je prêtai crédit à l’hypothèse du

Dr Reilly.

J’eus l’impression nette que l’assassin se trouvait parmi nous… dans cette

salle à manger et… en train d’écouter. Un de nous…

Sans doute Mme Mercado en eut-elle également l’intuition, car elle poussa

un petit cri aigu.

— C’est plus fort que moi, sanglota-t-elle. Je… c’est si terrible !

— Courage, Marie ! lui dit son époux.

Il nous regarda en manière d’excuse.

— Elle est si sensible, ajouta-t-il. Elle prend tellement les choses à cœur.

— Je… j’aimais tant Louise ! soupira Mme Mercado.

Je ne sais si mes sentiments se trahirent sur mes traits, mais je m’aperçus

soudain que M. Poirot me dévisageait et que ses lèvres esquissaient un sourire.

Je lui répondis par un regard froid et, aussitôt, il reprit l’interrogatoire.

— Veuillez me dire, madame, de quelle façon vous avez passé l’après-midi

d’hier.

— Je me suis lavé la tête, pleurnicha Mme Mercado. C’est affreux de penser

que pendant ce temps je vaquais à mes occupations, toute joyeuse, sans rien

soupçonner.

— Vous vous trouviez dans votre chambre ?

— Oui.

— Vous n’en êtes pas du tout sortie ?

— Non, pas avant l’arrivée de la camionnette. Le bruit me fit quitter ma

chambre et j’appris tout ce qui venait de se passer. Oh ! que c’est affreux !

— En avez-vous été surprise ?

Mme Mercado cessa de gémir et ouvrit des yeux fulgurants de colère.

— Monsieur Poirot, que dites-vous ? Insinueriez-vous ?…

— Ce que je dis, madame ? Simplement que, d’après vos déclarations, vous

aimiez beaucoup Mrs Leidner, et qu’elle a pu vous faire ses confidences.

— Oh ! je comprends… Non, non, cette chère Louise ne m’a jamais rien

confié… du moins rien de précis. J’ai remarqué sa nervosité et son air inquiet. En

outre, elle racontait des faits étranges : des mains frappant à sa fenêtre… que sais-

je encore ?

— Des imaginations, disiez-vous ! avançai-je, incapable de garder davantage

le silence.

Je constatai avec satisfaction son embarras soudain.

Une fois de plus, M. Poirot lança dans ma direction un coup d’œil amusé.

Il résuma, d’une façon méthodique :

— Ce qui revient à dire, madame, que vous vous laviez les cheveux, que

vous n’avez rien vu, ni rien entendu. Vous souvenez-vous de quelque détail

capable de nous aider en quelque chose ?

Mme Mercado ne prit même pas le temps de réfléchir.

— Non, pas le moindre détail. Pour moi, tout cela est bien mystérieux. Mais

à mes yeux un fait demeure certain : le meurtrier est venu du dehors. C’est

l’évidence même.

Poirot se tourna vers son mari.

— Et vous, monsieur, qu’avez-vous à dire ?

M. Mercado, sursauta nerveusement. Il tira sur sa barbe d’un air gêné.

— Sans aucun doute, l’assassin venait de l’extérieur. Lequel d’entre nous

aurait pu faire du mal à Mrs Leidner ? Elle était si bonne… si aimable… (Il hocha

la tête.) Celui qui l’a tuée était un monstre… oui, un monstre !

— Et vous, monsieur, comment avez-vous passé l’après-midi d’hier ?

— Moi ?

Il regarda dans le vide.

— Vous étiez dans le laboratoire, Joseph, lui souffla sa femme.

— Ah ! oui. En effet, en effet. J’accomplissais ma tâche habituelle.

— À quelle heure y êtes-vous allé ?

De nouveau, il sembla désemparé et interrogea sa femme du regard.

— À une heure moins dix, Joseph.

— Ah ! oui. À une heure moins dix.

— Êtes-vous sorti dans la cour ?

— Non… je ne pense pas. (Une pause.) Non, je suis sûr de ne pas être sorti

une seule fois.

— À quelle heure avez-vous appris le drame ?

— Ma femme est venue m’en informer. Cette affreuse nouvelle me révolta.

Je ne pouvais y croire. Encore maintenant, j’ai de la peine à me figurer que c’était

vrai.

Soudain, il se mit à trembler.

— C’est horrible… horrible…

Mme Mercado s’empressa auprès de lui.

— Oui, oui, Joseph. Nous sommes tous chagrinés, mais nous ne devons pas

nous abandonner à notre douleur. N’aggravons pas les souffrances de ce pauvre

Dr Leidner.

Un spasme nerveux contracta les traits du docteur, et j’en conçus que toutes

ces démonstrations lui étaient pénibles. Il lança un regard vers Poirot comme pour

le supplier de poursuivre.

— Miss Johnson ? dit aussitôt le détective.

— Je crains de ne pouvoir vous apprendre grand-chose.

La voix distinguée de la vieille demoiselle nous reposa après les intonations

perçantes de Mme Mercado. Elle continua :

— Je travaillais dans la salle commune, prenant des impressions sur

plasticine de cachets cylindriques.

— Et vous n’avez rien vu ni rien entendu ?

— Non, monsieur.

Poirot la fixa un instant des yeux. Tout comme la mienne, son oreille avait

surpris dans sa voix une faible indécision.

— En êtes-vous bien certaine, mademoiselle ? Un vague souvenir ne se

représente-t-il pas à votre esprit ?

— Non… vraiment non.

— Quelque chose que vous avez vu… du coin de l’œil, disons, à votre insu.

— Non, je vous l’assure.

— Alors, quelque chose que vous avez entendu. Oui, quelque chose que

votre oreille aurait perçu sans bien s’en rendre compte ?

Miss Johnson émit un petit ricanement.

— Vous insistez un peu trop, monsieur Poirot. On dirait que vous voulez me

faire dire des choses qui n’existent peut-être que dans mon imagination.

— Alors, il y aurait donc quelque chose… dans votre imagination ?

Miss Johnson répondit lentement, en pesant chacune de ses paroles.

— Je me suis imaginé depuis… qu’à un certain moment de l’après-midi, j’ai

entendu un faible cri. J’ose même déclarer que j’ai véritablement entendu un cri.

Toutes les fenêtres de la salle commune étant ouvertes, on y entend tous les bruits

que font les indigènes travaillant dans les champs d’orge. Mais, depuis… je me

suis mis en tête que… j’avais entendu crier Mrs Leidner. Je me reproche

vivement de n’avoir pas bougé. Qui sait ? Peut-être serais-je arrivée à temps ?

Le Dr Reilly intervint d’un ton autoritaire.

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