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CHAPITRE XXII DAVID EMMOTT, LE PÈRE LAVIGNY, UNE(2)

时间:2023-10-07来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Je me le suis moi-mme demand bien souvent. Et avez-vous fini par vous former une opinion ? Ma foi, oui ! Eh bien ?Mais
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— Je me le suis moi-même demandé bien souvent.

— Et avez-vous fini par vous former une opinion ?

— Ma foi, oui !

— Eh bien ?

Mais Mr Emmott crut bon de s’abstenir et dit, après un court silence :

— Que pense d’elle miss Leatheran ? Une femme a vite fait d’en juger une

autre, dit-on. De plus, une infirmière possède une expérience variée en la matière.

Poirot ne me laissa pas le temps de placer un mot, même si j’avais eu le désir

de parler.

— Ce que je veux savoir, dit-il, c’est ce qu’en pense un homme !

Emmott esquissa un sourire.

— Tous partageront le même avis… Mrs Leidner n’était certes pas de la

première jeunesse, mais sans conteste d’une beauté remarquable.

— Cette réponse n’en est pas une, monsieur Emmott.

— En tout cas, c’en est presque une, monsieur Poirot.

Il se tut quelques instants et poursuivit :

— Je me rappelle avoir lu, dans mon enfance, un conte de fées : la Reine des

Neiges. Mrs Leidner me rappelle cette Reine des Neiges qui toujours emmenait le

petit Key en promenade dans son carrosse.

— Ah ! ça, c’est un conte d’Andersen, n’est-ce pas ? Il y avait aussi une

petite fille nommée la petite Gerda, si je ne me trompe ?

— Peut-être. Ma mémoire ne va pas jusque-là.

— Pourriez-vous m’en dire davantage, monsieur Emmott ?

David Emmott secoua la tête.

— Je ne sais si moi-même je l’ai correctement jugée. C’était une femme

énigmatique ; un jour, capable d’une mesquinerie et, le lendemain, d’un acte

généreux. De même que vous, je la considère comme le noyau de cette affaire.

Voilà le but vers lequel tendaient tous ses efforts : être le centre de l’univers. Il lui

fallait que tout le monde s’occupât d’elle ; non pas seulement pour lui passer les

rôties et le beurre, mais vous deviez mettre votre esprit et votre cœur à nu devant

elle.

— Et si quelqu’un refusait de se prêter à ses caprices ? demanda Poirot.

— Alors elle devenait méchante !

Il pinça les lèvres et serra les mâchoires.

— Monsieur Emmott, consentiriez-vous à me dire, à titre tout à fait

confidentiel, qui, selon vous, a commis le crime ?

— Je ne sais pas. Je n’en ai pas la moindre idée. À la place de Carl… Carl

Reiter, il y a longtemps que je me serais débarrassé d’elle. Elle lui en a fait voir

de cruelles ! Mais, entre nous, il n’a eu que ce qu’il méritait. A-t-on idée d’être

aussi bonasse : c’est inviter les gens à vous botter le derrière !

— Mrs Leidner lui a-t-elle… botté le derrière ? s’enquit Poirot.

Emmott ricana.

— Non ! Seulement de petites piqûres avec une aiguille à broder… telle était

sa façon d’opérer. Carl est exaspérant comme un gamin geignant et stupide, mais

une aiguille est une arme redoutable.

Lançant un regard vers Poirot, je crus percevoir un léger tremblement sur ses

lèvres.

— Vous ne soupçonnez tout de même pas Carl Reiter de l’avoir assassinée ?

demanda-t-il.

— Non, à mon sens, on ne tue pas une femme parce qu’elle vous tourne en

ridicule à chaque pas.

Poirot hocha pensivement la tête.

D’après Mr Emmott, Mrs Leidner n’avait plus rien d’un être humain. Il

convenait d’entendre un autre son de cloche.

— Ce Mr Reiter était vraiment agaçant. Il sautait dès qu’elle lui adressait la

parole et se livrait à des bouffonneries idiotes. Par exemple, il lui passait la

marmelade plusieurs fois de suite, sachant pertinemment qu’elle n’y touchait

jamais. À maintes reprises, j’eus moi-même l’envie de le rappeler à l’ordre.

Les hommes ne se figurent pas à quel point leurs empressements

intempestifs ont le don d’énerver les femmes.

À l’occasion, je songerai à en toucher un mot à M. Poirot.

Arrivés à la maison, Mr Emmott offrit à M. Poirot de le conduire à sa

chambre pour lui permettre de faire un brin de toilette.

Quant à moi, je me hâtai de regagner la mienne.

Je sortis à peu près en même temps que les deux hommes et tous trois nous

nous dirigions vers la salle à manger, lorsque le père Lavigny, ouvrant la porte de

sa chambre, invita M. Poirot à entrer.

Mr Emmott me rejoignit et ensemble nous pénétrâmes dans la salle à

manger. Miss Johnson et Mme Mercado s’y trouvaient déjà, et, après quelques

minutes, M. Mercado, Mr Reiter et Bill Coleman firent leur apparition.

Nous venions de nous asseoir, et M. Mercado avait envoyé le boy arabe

prévenir le père Lavigny que le lunch était prêt, quand un cri faible et étouffé

nous fit tous sursauter.

Nos nerfs devaient être à bout, car tous nous nous levâmes d’un bond et

miss Johnson, pâle comme un linge, s’écria :

— Qu’est-ce que cela peut bien être ? Que se passe-t-il encore ?

Mme Mercado, la fixant dans les yeux, lui dit :

— Qu’avez-vous donc, chère miss Johnson ? C’est seulement un bruit dans

les champs.

À cet instant même, Poirot et le père Lavigny entrèrent.

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