【法语阅读——驴皮记】La peau de chagrin (2.15)
La partie II. La Femme sans coeur
Quand je fus bien résolu à suivre mon nouveau plan de vie, je cherchai mon logis dans les quartiers les plus déserts de Paris. Un soir, en revenant de l'Estrapade, je passais par la rue des Cordiers pour retourner chez moi. A l'angle de la rue de Cluny, je vis une petite fille d'environ quatorze ans qui jouait au volant avec une de ses camarades, et dont les rires et les espiègleries amusaient les voisins. Il faisait beau, la soirée était chaude, le mois de septembre durait encore. Devant chaque porte, des femmes assises devisaient comme dans une ville de province par un jour de fête. J'observai d'abord la jeune fille, dont la physionomie était d'une admirable expression, et le corps tout posé pour un peintre. C'était une scène ravissante. Je cherchai la cause de cette bonhomie au milieu de Paris, je remarquai que la rue n'aboutissait à rien, et ne devait pas être très passante. En me rappelant le séjour de J.-J. Rousseau dans ce lieu, je trouvai l'hôtel Saint-Quentin, le délabrement dans lequel il était me fit espérer d'y rencontrer un gîte peu coûteux, et je voulus le visiter. En entrant dans une chambre basse, je vis les classiques flambeaux de cuivre garnis de leurs chandelles, méthodiquement rangés au-dessus de chaque clef, et fus frappé de la propreté qui régnait dans cette salle ordinairement assez mal tenue dans les autres hôtels et que je trouvai là peignée comme un tableau de genre ; son lit bleu, les ustensiles, les meubles avaient la coquetterie d'une nature de convention.
La maîtresse de l'hôtel, femme de quarante ans environ, dont les traits exprimaient des malheurs, dont le regard était comme terni par des pleurs, se leva, vint à moi ; je lui soumis humblement le tarif de mon loyer ; mais, sans en paraître étonnée, elle chercha une clef parmi toutes les autres, et me conduisit dans les mansardes où elle me montra une chambre qui avait vue sur les toits, sur les cours des maisons voisines, par les fenêtres desquelles passaient de longues perches chargées de linge. Rien n'était plus horrible que cette mansarde aux murs jaunes et sales, qui sentait la misère et appelait son savant. La toiture s'y abaissait régulièrement et les tuiles disjointes laissaient voir le ciel. Il y avait place pour un lit, une table, quelques chaises, et sous l'angle aigu du toit je pouvais loger mon piano.
N'étant pas assez riche pour meubler cette cage digne des plombs de Venise, la pauvre femme n'avait jamais pu la louer. Ayant précisément excepté de la vente mobilière que je venais de faire les objets qui m'étaient en quelque sorte personnels, je fus bientôt d'accord avec mon hôtesse, et m'installai le lendemain chez elle. Je vécus dans ce sépulcre aérien pendant près de trois ans, travaillant nuit et jour sans relâche, avec tant de plaisir que l'étude me semblait être le plus beau thèmes la plus heureuse solution de la vie humaine. Le calme et le silence nécessaires au savant ont je ne sais quoi de doux, d'enivrant comme l'amour. L'exercice de la pensée, la recherche des idées, les contemplations tranquilles de la Science nous prodiguent d'ineffables délices, indescriptibles comme tout ce qui participe de l'intelligence dont les phénomènes sont invisibles à nos sens extérieurs. Aussi sommes-nous toujours forcés d'expliquer les mystères de l'esprit par des comparaisons matérielles. Le plaisir de nager dans un lac d'eau pure, au milieu des rochers, des bois et des fleurs, seul et caressé par une brise tiède, donnerait aux ignorants une bien faible image du bonheur que j'éprouvais quand mon âme se baignait dans les lueurs de je ne sais quelle lumière, quand j'écoutais les voix terribles et confuses de l'inspiration, quand d'une source inconnue les images ruisselaient dans mon cerveau palpitant. Voir une idée qui point dans le champ des abstractions humaines comme le soleil au matin et s'élève comme lui, qui, mieux encore, grandit comme un enfant, arrive à la puberté, se fait lentement virile, est une joie supérieure aux autres joies terrestres, ou plutôt c'est un divin plaisir.
“当我决心遵循我的新生活道路之后,我便到巴黎最僻静的地区去寻找寓所。一天晚上,我从吊刑街回来,取道绳商街回家,在经过克吕尼街的拐弯处,看见一个约莫十四岁的姑娘,正在和她的一个女同学踢毽子,她们的欢笑和戏谑给邻人们带来了乐趣,当时天气晴朗,气候相当热,九月天还没有过去。各家门前都有妇女在闲坐聊天,象外省城市人们过节日那样。我首先端详那姑娘,她的面貌有种绝妙的表情,她的体态是画家现成的模特儿。这是一个迷人的场景。我正在思索为什么在巴黎中心会有这种淳朴的景况时,发现这条街并没有出口,过往的人一定不很多。我忆起卢梭曾在这里住过,同时发现了这家叫圣康坦的旅馆;它那破烂的外表使人希望能在里面找到一间便宜的寓所,我便决定进去看看。在走进一间低矮的房间时,我瞥见了一些在每个烛眼上都有条不紊地插着蜡烛的老式蜡烛台,使我感到惊奇的是这间厅堂的整洁状态,在别的旅馆,这种地方通常总是相当乱糟糟的。我还发现这里的陈设简直象一幅风俗画;它的蓝色的床,日用器皿和家具都显示出一种昔日的时髦气派。
“旅馆女主人是一位四十来岁的妇人,面部线条显示出久经苦难的痕迹,眼神似乎因为流泪过多而失去光辉,她站起身向我走来;我谦卑地告诉她我所能支付的房租;她并不觉得诧异,就在一排钥匙里找出一把来,领我到顶楼上去,打开一个房间让我看,从这间屋子的窗口可以望见附近房屋的屋顶和庭院,以及从这些房屋的窗子伸出的许多晾满衣服的长竿。这间阁楼的墙壁又黄又脏,再没有比这更可怕的地方了,它发出穷酸的气味,召唤穷学者来赁居。屋里的空间仅够放一张床,一张桌子,几把椅子,在房顶的夹角下还能放我的钢琴。
“因为没有钱买家具来布置这个堪与威尼斯铅顶监狱①媲美的鸟笼子,这可怜的妇人一直没能够把它租出去。凑巧,不久前,在我拍卖动产的时候,还剩下一些我认为是属于我私人的什物,很快我就和老板娘谈妥,把房子租下来,第二天就搬进去住了。在这个空中坟墓里,我居住了差不多三年,我日夜不停地工作,心情非常愉快,我认为人生最美好的主旨和人类生活最幸福的结果,无过于学习了。学者所必需的安静和沉寂对我来说有着说不出的甜蜜,就象爱情那样令人沉醉。思维的运用,观念的探索,对科学宁静的沉思,给我们带来了不可名状的愉快,其中的乐趣是无法描绘的,就象一切智慧的活动,它的各种现象都是我们的外部官能所不能窥见的。因此,我们便常常被迫采用物质的比较法来解释精神的奥秘。在树林、岩石以及繁花环绕的湖中,独自一人在清澈的湖水中游泳,薰风拂面,那种乐趣,给予一个无知之辈的微弱幸福感,比起我,当我的灵魂沐浴在一种无法形容的光辉中,当我倾听灵感的可怕的、混乱的呼声时,当我的活跃的头脑里有无数形象如同一股不知名的泉水涓涓流淌时的幸福感觉,简直无法比拟。又如看到一个意念,象朝阳那样突然在人类的怞象世界的旷野中升起,而且比朝阳更妙的是它能象孩子般成长,由青春期逐渐成熟,这种快乐超过世上任何别的乐趣,或者可以说这是一种神圣的快乐。
①指威尼斯的杜卡尔宫的最高层,这层用来做监狱,屋顶用很薄的铅皮做成,由于铅的传导作用,温度骤冷骤然,使犯人的生活分外痛苦。