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ODE A L'IVRESSE

时间:2020-10-20来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Ivresse chaude et forte,A qui j'ouvre ma porteLes jours de dsespoir,Ivresse, viens ce soir.Viens, clate et flamboie!Ivre
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 Ivresse chaude et forte,
A qui j'ouvre ma porte
Les jours de désespoir,
Ivresse, viens ce soir.
Viens, éclate et flamboie!
Ivresse, sois ma joie;
Apaise à flots pressants
La soif de tous mes sens.
Viens, nous irons, ma chère,
Voir sous le réverbère
Les ivrognes ronflants
Et rouges de vins blancs;
Et ces fakirs des halles,
Qui rêvent sur les dalles
D'un cabaret impur,
Les yeux fixés au mur.
Sur le seuil des tavernes,
Trébuchants, les yeux ternes,
Ta bouche me dira
Hoffmann et Lantara.
Quelle forme enchantée,
Courtisane-protée,
Quel costume impromptu
Pour moi vêtiras-tu?
Auras-tu robe blanche,
Col étroit, lourde hanche,
Et, Champagne engageant,
La couronne d'argent?
Seras-tu la coquine
Et svelte Médocquine,
Qu'on boit à petit feu,
Fille de Richelieu?
Ou la Flamande épaisse,
Honneur de la kermesse!
Dont Brauwer le fripon
Tracasse le jupon?
Terrible ou caressante,
Pâlie ou rougissante,
Au diable l'embarras!
Viens comme tu voudras;
Viens, pourvu que je voie,
Vieille fille de joie,
Étinceler encor
L'eau-de-vie aux yeux d'or,
Sans voile, sans agrafe,
Toute nue, en carafe,
Éclair emprisonné
Sous le cristal orné!
Viens, je suis ton poëte!
Avant que je te jette
Mes bras autour du cou,
Va mettre le verrou.
Est-ce que tu me boudes?
Pose là tes deux coudes,
Et, pendant que je bois,
Parle-moi d'autrefois.
Te souvient-il, drôlesse,
De ma grande tristesse
Et des pleurs insensés
Que nous avons versés?
Heures trop tôt flambées!
Grosses larmes tombées!
Fureurs sous les balcons!
Délires sans flacons.
Bah! si je vous regrette
C'est peut-être en poëte;
Et peut-être ai-je tort
De croire mon cœur mort.
L'amour! je le retrouve,
Chaud comme sang de louve,
Au fond du verre ardent
Qui grince sous ma dent.
Mettre, ô folle merveille!
Des baisers en bouteille,
Et, comme une liqueur,
Boire à longs traits son cœur!
Aussi bien, ma maîtresse,
C'est toi, toi seule, Ivresse!
Et, dans tes bras de feu,
A tout j'ai dit adieu.
Ah! comme je t'adore,
Effroyable Pandore!
Pourtant, je te le dis,
Souvent je te maudis.
Cet amour que j'étale
Pour toi, belle brutale,
On en sait le pourquoi:
Tu ne trompes pas, toi!
Tu ne sais pas, d'usage,
Avec un art sauvage
Tirer les pleurs des yeux:
Tu fais mourir, c'est mieux.
Viens, les coupes sont prêtes,
Madère des tempêtes,
Toi, gin qui fais les fous,
Et vin à quatre sous!
Viens, il me faut la lutte
Sous la table en culbute,
Tous deux, à bras le corps,
Et les yeux en dehors.
Les bouteilles qu'on casse,
Les chaises que ramasse
Le plaintif hôtelier,
Tordant son tablier;
Les coups, et puis la garde,
Et le sang qu'on regarde
Couler stupidement
Sur le plancher fumant…
Prends toute ma tendresse,
Je t'appartiens, Ivresse;
Maintenant c'est ton tour,
Et que meure l'Amour!
Meurs, toi qui fus mon maître,
Meurs deux fois;—et peut-être
Qu'un jour, en frappant là,
Plus rien ne répondra!
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