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A THEOPHILE GAUTIER

时间:2020-10-20来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Nous tions cinq ou six potesDans le divan Le Peletier,Lorsquetrop rares sont ces ftes!L'autre soir, tu parus, Gautier.Je
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 Nous étions cinq ou six poëtes
Dans le divan Le Peletier,
Lorsque—trop rares sont ces fêtes!—
L'autre soir, tu parus, Gautier.
Je ne sais quelle humeur quinteuse
M'avait faite un vin bourguignon,
Et mis sur ma langue pâteuse
L'accent d'un critique grognon.
Comme un chat ferait d'un rosaire,
Ressuscitant de vieux lazzis,
J'égrenais ton vocabulaire
De diamants et de rubis.
Tout emmailloté de morale,
Je blâmais tes tons enivrés,
Et de ta forme sculpturale
Les angles aux reflets dorés.
Au grand style, à tout ce que j'aime,
Dès le début ayant failli,
Je parlai longuement sur ce thème
Comme Alexandre Dufaï
C'était surtout à ton école
Que j'en voulais; à ces enfants
Qui, dans un pan de ton étole
Se font des manteaux si bouffants;
A ce groupe de flatteurs blêmes
Que l'on voit courbés et furtifs,
Dans tes livres, dans tes poëmes,
Ramasser tes bouts d'adjectifs;
A ces enragés coloristes
Devant lesquels Diaz pâlit,
Si brillants et pourtant si tristes,
Orientaux de chianlit!
Adeptes d'un art inutile,
Race d'employés au Trésor,
Dans le Sacramento du style
Recherchant des pépites d'or.
Ce qu'il fait derrière toi, maître,
Ce troupeau si peu clairvoyant,
Il ne s'en doute pas peut-être:
C'est du Delille flamboyant!
Et bien! oui, j'étais en colère,
J'allais, voix en quête d'échos,
Comme le prince atrabilaire
Criant: «Des mots! des mots! des mots!»
J'étais cruel. De leur folie
Tu n'es pas responsable, toi,
Noble vin, dont ils sont la lie,
Musique, dont ils sont l'aboi.
J'étais injuste. Mais quand même
J'aurais eu froidement raison,
Quant à mon imprudent blasphème
J'eusse conquis l'opinion;
J'omettais dans mon injustice
L'enfer auquel on t'a lié,
Cet intolérable supplice
Par Monsieur de Sade oublié:
Le feuilleton!—Triste machine,
Qui fait du matin jusqu'au soir
Fonctionner, comme l'usine,
L'intelligence au désespoir!
Voilà bientôt dix-sept années,
Laps immense! tourment sans fin!
Que les muses infortunées
Maudissent en chœur Girardin;
Lui qui, dans son avide joie,
T'a cloué, Prométhée hardi,
Et qui donne à manger ton foie
Au feuilleton, chaque lundi!
Quand, loin de notre humaine sphère,
La rime voudrait t'emmener,
C'est ton article qu'il faut faire,
Tout Plaute a sa meule à tourner.
Apprête donc ta plume agile
Pour le journal du lendemain:
L'inspiration dit Virgile,
Le feuilleton dit Laurencin.
Ah! grand et malheureux poëte
Par la prose toujours rongé,
Ce délire que je regrette,
Tu devais en être vengé:
A mon tour,—que Dieu me pardonne!—
Aujourd'hui je change de ton,
Car ces stances, je les griffonne
Sur la marge d'un feuilleton.
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