【法语阅读——驴皮记】La peau de chagrin (2.12)
La partie II. La Femme sans coeur
Enfin il existe, dans le manège d'un agent de change qui fait les commissions d'une femme pâle et minaudière, je ne sais quoi de mesquin dont a horreur l'artiste. L'amour abstrait ne suffit pas à un homme pauvre et grand, il en veut tous les dévouements. Les petites créatures qui passent leur vie à essayer des cachemires ou qui se font les portemanteaux de la mode n'ont pas de dévouement, elles en exigent et voient dans l'amour le plaisir de commander, non celui d'obéir. La véritable épouse en coeur, en chair et en os, se laisse traîner là où va celui en qui réside sa vie, sa force, sa gloire, son bonheur. Aux hommes supérieurs, il faut des femmes orientales dont l'unique pensée soit l'étude de leurs besoins ; car, pour eux, le malheur est dans le désaccord de leurs désirs et des moyens. Moi, qui me croyais homme de génie, j'aimais précisément ces petites maîtresses ! Nourrissant des idées si contraires aux idées reçues, ayant la prétention d'escalader le ciel sans échelle, possédant des trésors qui n'avaient pas cours, armé de connaissances étendues qui surchargeaient ma mémoire et que je n'avais pas encore classées, que je ne m'étais point assimilées ; me trouvant sans parents, sans amis, seul au milieu du plus affreux désert, un désert pavé, un désert animé, pensant, vivant, où tout vous est bien plus qu'ennemi, indifférent ! la résolution que je pris était naturelle, quoique folle ; elle comportait je ne sais quoi d'impossible qui me donna du courage. Ce fut comme un parti fait avec moi-même, et où j'étais le joueur et l'enjeu. Voici mon plan.
Mes onze cents francs devaient suffire à ma vie pendant trois ans, et je m'accordais ce temps pour mettre au jour un ouvrage qui pût attirer l'attention publique sur moi, me faire une fortune ou un nom. Je me réjouissais en pensant que j'allais vivre de pain et de lait, comme un solitaire de la Thébaïde, plongé dans le monde des livres et des idées, dans une sphère inaccessible au milieu de ce Paris si tumultueux, sphère de travail et de silence où comme les chrysalides, je me bâtissais une tombe pour renaître brillant et glorieux. J'allais risquer de mourir pour vivre.
En réduisant l'existence à ses vrais besoins, au strict nécessaire, je trouvais que trois cent soixante-cinq francs par an devaient suffire à ma pauvreté. En effet, cette maigre somme a satisfait à ma vie, tant que j'ai voulu subir ma propre discipline claustrale...
“总之,在专门替脸色苍白,惯作娇态的女人服务的证券经纪人中,的确存在着某种使艺术家作呕的庸俗作风。怞象的爱情并不能使一个贫穷而伟大的人感到满足,他所要求的是对爱情的全部忠诚。那些轻佻的妇女,她们把时间浪费在试开司米披肩上,或自愿充当时装衣架,她们根本谈不上什么忠诚,却要求别人忠诚,并且在爱情上以对别人发号施令为乐,而不是以服从为幸福。一个在心灵、肉体、骨子里都配称做真正的妻子的女人,总是丈夫到哪里,她就跟到哪里,因为她的生命,她的力量,她的光荣和她的幸福都寄托在他身上。一个优秀的男人所需要的是东方式的女子,她们唯一关心的就是研究男人的需要;因为对男人来说,不幸就发生在他们的欲望和满足欲望的方法之间的矛盾。我嘛,自信是天才人物,我所爱的正是这种爱娇的女人,抱着这种和我所接受的传统观念如此矛盾的思想,又一心想要平步青云,我还拥有无价的宝藏,拥有超过我的记忆所能负担的广泛知识,对这些知识我还来不及分类和加以消化;而我却发现自己既无亲戚,又无朋友,一个人孤零零地迷失在最骇人的沙漠里,这是一个有石板路的,热闹的沙漠,在那里,有人在思想,在生活,可是,一切事物对你却漠不关心,比敌意更令人难受!可是我所作出的决定,尽管是疯狂的,却也是自然的;它包含有某种不可能的因素,而它却给了我勇气。这好象是一场我对自己的打赌,在这场赌博里,我既是赌徒,又是赌注。以下便是我的行动计划。
“我的一千一百法郎,应该足够我三年的生活费用。我定出这个期限是想在这段时间内写出一部能引起公众重视的著作,使我获得财富和文名。当我想到即将单靠面包和牛奶生活时,心里感到十分高兴,我将象泰巴伊德①沙漠上的隐士那样,投身在书本和思想的世界里,在这个十里红尘的巴黎中的一个世外桃源里,一个工作和沉寂的领域里,我将象虫蛹那样替自己建造一座坟墓,以便有朝一日在光荣和胜利中再生,我打算为生存而去冒死的危险。”
“把生活水平压缩到真正最低需要的程度,以严格的必要为界限,我认为三百六十五法郎足够我过一年清苦生活。实际上,只要我愿意遵守自己所定的修道院式的纪律,这笔小小的款子也就够了。”
①泰巴伊德,上埃及的沙漠地带,初期基督教教士隐居的地方