Chapitre 1 : Vladimir
Vladimir Igor Borenchensko, depuis qu’il savait frapper sur un arbre, était bûcheron comme son père l’était et le père de son père ainsi que le père du père de son père.
Aussi loin que la mémoire peut remonter dans le temps chez les Borenchensko, on est bûcheron de père en fils. Comme les Romanov sont Tsars de toutes les Russies depuis des générations, les Borenchensko abattent des arbres et vendent à la ville le bois qu’ils ont fendu.
C’est ainsi et jamais Vladimir ne s’est plaint, malgré la solitude, malgré les longs hivers, malgré les loups ou les accidents. Au contraire, Vladimir rendait grâce, tous les matins, d’être debout et de pouvoir partir sa hache sur l’épaule, abattre un centenaire.
Ce jour-là, avant le lever du soleil, Vladimir devait partir pour la ville voisine. Enfin, " voisine " c’est une image. À plus de 60 verstes, il fallait au moins une journée de troïka pour y arriver, à condition que le temps ne soit pas mauvais. Or, cela faisait deux jours, qu’une tempête de neige clouait Vladimir sur place. Depuis deux longues journées, Vladimir attendait une accalmie, mais rien, aucun signe d’apaisement ne se profilait. Bien au contraire, le vent forcissait, le froid s’intensifiait et la neige, flocon après flocon, recouvrait tout.