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IV AU ROUET QUI TOURNE

时间:2020-09-30来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Dans la vraie tradition anglaise le principe de la subordination au mle tait absolu; quelle que ft l'indignit de l'homme
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 Dans la vraie tradition anglaise le principe de la subordination au mâle était absolu; quelle que fût l'indignité de l'homme, la femme mariée était supposée devoir à son mari une affection humble et servile, cette subordination était tellement entrée dans les mœurs, elle avait pénétré si avant dans l'âme des femmes anglaises qu'on a vu de nos jours des créatures d'élite comme une madame Carlyle accepter de n'être que[Pg 50] la servante de leur mari. Il y a une vingtaine d'années, la presse anglaise par un de ces plébiscites d'opinion qu'elle affectionne, agita la question de savoir si dans certains cas, ivrognerie habituelle ou débauche incorrigible, une honnête femme avait le droit de quitter son mari et de se soustraire au risque de mettre des malheureux au monde? L'opinion publique se prononça nettement pour la négative et les femmes, qui avaient revendiqué la légitimité de ce droit, furent généralement considérées comme manquant d'un certain sens moral.
 
Depuis quelques années tout cela a radicalement changé; les femmes ont osé relever la tête, elles ont cherché leur voie, et à côté d'excentricités inévitables[Pg 51] ont atteint un légitime affranchissement. L'idéal parfaitement rationnel, en somme, de l'Américaine, to have a good time (avoir un bon temps) est devenu celui des Anglaises, la médiocrité suffit de moins en moins et la chimère des préjugés s'affaiblit et disparaît avec une rapidité vertigineuse, les exemples sont partout.
 
A l'enseigne du Rouet qui tourne, dans Fulham road, lady M..... tient un magasin de curiosités et arrange d'une façon exquise sa devanture, mélangeant les narcisses aux objets d'art, groupant les bibelots et les vieux meubles!—Voilà où en sont les «ladies» aujourd'hui, elles ouvrent boutique, étant d'avis qu'il n'est pas de plus sot métier que de n'avoir pas d'argent; les unes s'affublent[Pg 52] de noms de guerre et se font modistes ou couturières. Madame Lierre, dont les chapeaux sont fort bien notés, appartient à ces dix mille du haut qui paraissaient jusqu'ici une classe à part, et, dans ces transformations sociales, elles apportent une crânerie particulière qui provient précisément de la force des préjugés au milieu desquels elles ont d'abord vécu. Le côté louche et un peu suspect, à nos yeux, de la boutique remplie de fleurs, de la grâce féminine servant d'amorce et d'appât leur échappe; elles ne voient que le côté hardi, indépendant et rémunérateur de l'entreprise; elles sont encore une minorité, mais soyez tranquilles, l'exemple est donné, on ne s'ennuiera plus désormais, en cas de revers[Pg 53] ou de diminution de fortune, à faire ces besognes tristes qui semblaient seules convenir à une gentlewoman; on ne saura plus même bientôt ce qu'est une gentlewoman, ni la signification de ce mot, exquis dans son raffinement, car il ne voulait dire ni la richesse ni même la naissance, mais cette sorte d'aristocratie de l'être supérieur dont l'existence était régie par des lois mystérieuses, franc-maçonnerie d'honneur, de pureté, de délicatesse: tout ce qui était mercenaire et grossier, tout contact avec la foule vulgaire était nécessairement en horreur à la gentlewoman. Thackeray en a peint quelques-unes de main de maître, et les a toujours faites pauvres; pauvres, et cependant si assurées dans la sécurité[Pg 54] incontestée de leur supériorité sur les êtres riches qui les entourent; il y avait la grande tribu des veuves de soldats ou de marins, toutes ces femmes qui élevaient, avec un soin jaloux, leurs enfants dans les mêmes préjugés; les vieilles filles, nées dans le luxe, réduites à la pauvreté honnête; toutes étaient des gentlewomen, orgueilleuses de ce simple titre qui définissait leur rôle en ce monde. Et tout cela va être balayé, on s'est aperçu que, au fond, ces choses ne servaient qu'à passer fort tristement la vie et qu'il y avait mieux à faire. On a mis une enseigne à sa porte, et l'on vend de vieilles chaises à porteur, des chapeaux ou des robes, selon le goût particulier. Il est évident qu'au point de vue[Pg 55] de la raison pure rien ne peut être plus sensé, mais il reste à savoir si l'application de la raison pure est toujours profitable. A vouloir être trop libérale et de bon accueil, à se moquer elle-même de ses vieux préjugés, l'aristocratie anglaise joue une grosse partie, et, sans être un grand prophète, on peut croire que dans sa forme actuelle ses jours sont comptés. Tout est permis à une caste fermée qui est persuadée de sa supériorité, mais du moment qu'elle abdique elle-même et prétend à la liberté d'allure du premier plébéien venu, on ne sait plus très bien ce qu'elle signifie, et il est à craindre qu'un beau jour on ne le lui demande un peu rudement. Aussi longtemps que les femmes entretiennent le[Pg 56] feu du sanctuaire on peut avoir bon espoir, mais du moment où elles se rient et du sanctuaire et du feu sacré, il est probable qu'il ne tardera pas à s'éteindre, et le grand mouvement d'émancipation qui s'accomplit à cette heure en Angleterre vient de la femme. Il y a plusieurs courants, mais tous tendent au même but: s'affranchir de la tutelle de l'homme, vivre d'une vie personnelle. Cela vaut peut-être autant que d'aller aux Indes à la recherche d'un mari, comme il était fort d'usage, il y a trente et quarante ans, de le faire; on s'embarquait sous la protection de quelque femme d'officier, et, à peine débarquée, un célibataire affamé était trop heureux de vous emporter dans son bungalow. C'est que[Pg 57] le mariage paraissait alors la seule raison d'être de la femme, et une fois mariée, il s'agissait, pour remplir le programme jusqu'au bout, d'avoir beaucoup d'enfants.—Une jeune reine amoureuse sur le trône, un mari fidèle à son côté et un nombre croissant de babies dans la nursery, tel était le grand exemple, l'idéal de l'Anglaise du haut en bas de l'échelle sociale. La venue du baby réglementaire était en honneur dans les familles bien pensantes, et l'on se souciait fort peu qu'il y eût ou non du pain à la maison pour toutes ces bouches. Mais voilà que partout on s'est mis à enseigner la prévoyance, que toutes sortes d'idées nouvelles sont entrées dans des cervelles résignées; on prêche avec acharnement[Pg 58] le thrift (épargne) aux classes laborieuses, on cite pour cela à tout propos l'exemple de la France; on oublie trop que la première économie dans les ménages français est en général celle des enfants, et j'ai idée que beaucoup d'Anglaises commencent à la trouver raisonnable. L'imprévoyance est peut-être une qualité maîtresse des nations, MM. les économistes n'y ont pas assez réfléchi.
 
L'enfant anglais est une chose ravissante, et cela dans toutes les classes; la rage de parure, qui ne s'arrête pas au déguisement, sévit sur eux avec une intensité extraordinaire; l'enfant vient avec le chien d'espèce rare pour orner une voiture. Le côté théâtral de l'existence, qui est devenu une nécessité en Angleterre,[Pg 59] a été jusqu'à organiser des services religieux pour enfants; l'idée est bonne en soi, mais on arrive à la déformer singulièrement le jour où, sous prétexte de dons aux hôpitaux, chaque enfant apporte à l'autel son offrande de fleurs. C'est alors un déchaînement de vanités, un luxe et une invention de toilettes, d'arrangements singuliers pour les fleurs. Les personnalités se font jour de bonne heure; la mère n'est jamais en Angleterre cette couveuse de l'âme qu'elle est si souvent en France; l'existence de celles qui avec un dévouement sans égal se font les éducatrices de leurs filles, les répétitrices de leurs fils, n'aura jamais d'imitatrices en Angleterre, et cela par la bonne raison que le lien conjugal prime tous les autres,[Pg 60] que l'enfant n'est que l'accessoire, et que la séparation complète se fait au moment du mariage. Le grand frein de toutes les existences était le préjugé social, et il reçoit depuis vingt ans de furieux coups de bélier.
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