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LA PORTE ÉTROITE(20)

时间:2025-09-17来源:互联网 进入法语论坛
核心提示:Je copie, des lettres qui suivirent, tout ce qui peut instruire ce rcit: Cher Jrme, Je fonds de joie en te lisant. Jalla
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Je copie, des lettres qui suivirent, tout ce qui peut instruire ce récit : Cher Jérôme, Je fonds de joie en te lisant. J’allais répondre à ta lettre d’Orvieto, quand, à la fois, celle de Pérouse et celle d’Assise sont arrivées. Ma pensée se fait voyageuse ; mon corps seul fait semblant d’être ici ; en vérité, je suis avec toi sur les blanches routes d’Ombrie ; avec toi je pars au matin, regarde avec un œil tout neuf l’aurore… Sur la terrasse de Cortone m’appelais- tu vraiment ? je t’entendais… On avait terriblement soif dans la montagne au-dessus d’Assise ! mais que le verre d’eau du Franciscain m’a paru bon ! Ô mon ami ! je regarde à travers toi chaque chose. Que j’aime ce que tu m’écris à propos de saint François ! Oui, n’est-ce pas, ce qu’il faut chercher c’est une exaltation et non point une émancipation de la pensée. Celle-ci ne va pas sans un orgueil abominable. Mettre son ambition non à se révolter, mais à servir.

Les nouvelles de Nîmes sont si bonnes qu’il me paraît que Dieu me permet de m’abandonner à la joie. La seule ombre de cet été, c’est l’état de mon pauvre père ; malgré mes soins il reste triste, ou plutôt il retrouve sa tristesse dès l’instant que je l’abandonne à lui-même et il s’en laisse toujours moins aisément tirer. Toute la joie de la nature parle autour de nous une langue qui lui devient étrangère ; il ne fait même plus effort pour l’entendre. – Miss Ashburton va bien. Je leur lis à tous deux tes lettres ; chacune nous donne de quoi causer pour trois jours ; alors arrive une lettre nouvelle.

… Robert nous a quittés avant-hier ; il va passer la fin des vacances chez son ami R…, dont le père dirige une ferme modèle. Certainement la vie que nous menons ici n’est pas bien gaie pour lui. Je n’ai pu que l’encourager dans son projet, lorsqu’il a parlé de partir.

… J’ai tant à te dire ; j’ai soif d’une si inépuisable causerie ! parfois je ne trouve plus de mots, d’idées distinctes, – ce soir j’écris comme en rêvant – gardant seulement la sensation presque oppressante d’une infinie richesse à donner et à recevoir.

Comment avons-nous fait, durant de si longs mois pour nous taire ? Nous hivernions sans doute. Oh ! qu’il soit fini pour jamais, cet affreux hiver de silence ! Depuis que te voilà retrouvé, la vie, la pensée, notre âme, tout me paraît beau, adorable, fertile inépuisablement.

12 septembre.

J’ai bien reçu ta lettre de Pise. Nous aussi nous avons un temps splendide ; jamais encore la Normandie ne m’avait paru si belle. J’ai fait avant-hier, seule, à pied, une énorme promenade à travers champs, au hasard ; je suis rentrée plus exaltée que lasse, tout ivre de soleil et de joie. Que les meules, sous l’ardent soleil, étaient belles ! Je n’avais pas besoin de me croire en Italie pour trouver tout admirable.

Oui, mon ami, c’est une exhortation à la joie, comme tu dis, que j’écoute et comprends dans « l’hymne confus » de la nature. Je l’entends dans chaque chant d’oiseau ; je la respire dans le parfum de chaque fleur, et j’en viens à ne comprendre plus que l’adoration comme seule forme de la prière – redisant avec saint François : Mon Dieu ! Mon Dieu ! « e non altro », le cœur empli d’un inexprimable amour.

Ne crains pas toutefois que je tourne à l’ignorantine ! J’ai beaucoup lu ces derniers temps, quelques jours de pluie aidant, j’ai comme replié mon adoration dans les livres.

Achevé Malebranche et tout aussitôt pris les Lettres à Clarke, de Leibniz. Puis, pour me reposer, ai lu les Cenci, de Shelley – sans plaisir ; lu La Sensitive aussi… Je vais peut-être t’indigner ; je donnerais presque tout Shelley, tout Byron, pour les quatre odes de Keats que nous lisions ensemble l’été passé ; de même que je donnerais tout Hugo pour quelques sonnets de Baudelaire. Le mot : grand poète, ne veut rien dire : c’est être un pur poète, qui importe… Ô mon frère ! merci pour m’avoir fait connaître et comprendre et aimer tout ceci.

… Non, n’écourte pas ton voyage pour le plaisir de quelques jours de revoir.

Sérieusement, il vaut mieux que nous ne nous revoyions pas encore. Crois-moi : quand tu serais près de moi, je ne pourrais penser à toi davantage. Je ne voudrais pas te peiner, mais j’en suis venue à ne plus souhaiter – maintenant – ta présence. Te l’avouerais-je ? je saurais que tu viens ce soir… je fuirais.

Oh ! ne me demande pas de t’expliquer ce… sentiment, je t’en prie. Je sais seulement que je pense à toi sans cesse (ce qui doit suffire à ton bonheur) et que je suis heureuse ainsi.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Peu de temps après cette dernière lettre, et dès mon retour d’Italie, je fus pris par le service militaire et envoyé à Nancy. Je n’y connaissais âme qui vive, mais je me réjouissais d’être seul, car il apparaissait ainsi plus clairement à mon orgueil d’amant et à Alissa que ses lettres étaient mon seul refuge, et son souvenir, comme eût dit Ronsard, « ma seule entéléchie ».

À vrai dire, je supportai fort allègrement la discipline assez dure à laquelle on nous soumettait. Je me raidissais contre tout et, dans les lettres que j’écrivais à Alissa, ne me plaignais que de l’absence. Et même nous trouvions dans la longueur de cette séparation une épreuve digne de notre vaillance. – « Toi qui ne te plains jamais, m’écrivais Alissa ; toi que je ne peux imaginer défaillant… » Que n’eussé- je enduré en témoignage à ses paroles ? Un an s’était presque écoulé depuis notre dernier revoir. Elle semblait ne pas y songer, mais faire commencer d’à présent seulement son attente. Je le lui reprochai.

N’étais-je pas avec toi en Italie ? répondit-elle. Ingrat ! Je ne te quittai pas un seul jour. Comprends donc qu’à présent, pour un temps, je ne peux plus te suivre, et c’est cela, cela seulement que j’appelle séparation. J’essaie bien, il est vrai, de t’imaginer en militaire… Je n’y parviens pas. Tout au plus te retrouvé-je, le soir, dans la petite chambre de la rue Gambetta, écrivant ou lisant… et même, non ? en vérité, je ne te retrouve qu’à Fongueusemare ou au Havre dans un an.

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