du Paradis ; ton éducation s’en ressentira. Bois un bon coup à la source de
la sagesse et rapporte-m’en une petite bouteille.
– Je n’y manquerai pas ; mais pourquoi as-tu mis mon frère du Sud dans
le sac ? Il doit me parler de l’oiseau phénix, dont la princesse du jardin du
Paradis me demande des nouvelles tous les cent ans, quand je lui rends visite.
Ouvre le sac et je t’aimerai bien ; je te ferai cadeau de tout le thé dont j’ai
rempli mes deux poches, du thé bien vert et bien frais, que j’ai cueilli dans
le pays même.
– Soit ! à cause du thé, et parce que tu es mon petit chéri, j’ouvrirai le
sac. »
Le Vent du Sud fut mis en liberté, tout honteux d’avoir été puni devant
un prince étranger.
« Voici une feuille de palmier pour la princesse, dit le Vent du Sud ; le
vieil oiseau phénix, le seul qui existe au monde, me l’a donnée, et il y a
tracé avec son bec toute l’histoire de sa vie. La princesse pourra donc lire
cette biographie elle-même. J’ai vu le phénix incendier son propre nid et s’y
faire brûler comme la femme d’un Hindou. Quel parfum et quelle fumée ces
branches sèches répandaient ! Enfin les flammes avaient tout consumé, le
vieil oiseau n’était plus que de la cendre ; mais son œuf, rouge et brillant au
milieu du feu, se fendit avec un grand éclat, et donna passage à son petit,
qui est aujourd’hui le roi des oiseaux et le seul phénix du monde. Il a fait
avec son bec un trou dans cette feuille de palmier ; c’est ainsi qu’il présente
ses hommages à la princesse.
– Mangeons maintenant, » dit la mère des Vents.
Et tous s’assirent pour manger le cerf rôti. Le prince se plaça à côté du
Vent d’Est, et bientôt tous les deux se lièrent d’amitié.
« Dis-moi un peu, commença le prince, quelle est cette princesse dont
vous parlez tant ici, et où est situé le jardin du Paradis ?
– Oh, oh ! répondit le Vent d’Est, si tu veux y aller, accompagne-moi
demain seulement je dois te faire observer que depuis Adam et Ève aucun
homme n’y a mis les pieds. Est-ce que tu ne sais pas cela par la Bible ?
– Certainement, dit le prince.
– Lorsqu’ils furent chassés, continua le Vent d’Est, le jardin du Paradis
s’enfonça dans la terre, tout en conservant l’éclat bienfaisant du soleil, sa
douce température et toute sa magnificence. Il sert de résidence à la reine
des fées, et il renferme l’île de la Félicité, séjour délicieux où la mort est
inconnue. Tu pourras grimper demain sur mon dos, et je t’emmènerai, je
crois, sans difficulté. Mais à présent, tais-toi ; j’ai besoin de dormir. »