quelques-uns tout bas ; mais personne n’osait répéter ces paroles à haute
voix.
En ce moment le bourreau prit la main de la victime alors elle jeta
promptement les onze tuniques sur les cygnes, et, à l’instant même, ils se
changèrent en onze beaux princes. Le plus jeune avait encore une aile à la
place d’un bras, une des manches de la tunique n’étant pas achevée.
« Je puis donc parler, s’écria l’heureuse sœur ; sachez que je suis
innocente. »
Et le peuple, voyant ce qui se passait, s’inclina devant elle comme devant
une sainte ; mais la reine, succombant à tant d’émotion, tomba évanouie
dans les bras de ses frères.
« Oui, elle est innocente ! » dit le frère aîné, et il raconta toute la vérité.
Pendant son récit, il se répandait un parfum pareil à celui de mille roses,
car chacun des morceaux de bois qui formaient le bûcher avait pris tout à
coup racine et se couvrait de feuilles et de fleurs. Le lieu du supplice s’était
transformé en un épais bosquet de rosiers rouges, au-dessus desquels brillait
une fleur blanche comme une étoile. Le roi cueillit cette fleur et la posa sur
le cœur d’Élisa, qui revint à elle et qui montra sur sa figure l’expression de
la paix et du bonheur.
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Toutes les cloches des églises se mirent en branle d’elles-mêmes ; les
oiseaux accoururent en bandes joyeuses, et jamais roi n’eut un cortège
comme celui qui ramena au château les deux jeunes époux.