C'était en 1692. Le maréchal de Luxembourg, à la tête de 70,000 Français, guerroyait contre les Anglo-Hollandais commandés par Guillaume d'Orange. Ce dernier, qui s'était déjà illustré en plus de vingt combats, était un adversaire redoutable. Aussi le maréchal, à la veille de lui livrer bataille, lança-t-il un certain nombre d'espions dans la campagne. L'un de ceux-ci, après avoir échappé cent fois au danger d'être fait prisonnier, fut enfin pris par les Anglais. On le contraignit à écrire un faux avis au maréchal de Luxembourg, campé à quelques milles seulement. Celui-ci dispose ses troupes d'après cet avis perfide, et l'ennemi ne tarde pas à l'attaquer sur son point le plus faible. La déroute des nôtres commence. Mais le maréchal change aussitôt la disposition du combat; quoique malade, il charge trois fois en personne et ramène la victoire sous nos drapeaux. Ce fut la bataille de Steinkerque. Nos ennemis, après y avoir perdu 18,000 hommes, laissèrent entre nos mains environ 80 enseignes et 15,000 prisonniers. Guillaume enrageait de ne pouvoir battre Luxembourg, et se moquait des infirmités de son adversaire. Le maréchal était un peu contrefait, «Ne pourrai-je jamais battre ce vilain bossu? Disait Guillaume.--Comment sait-il que je suis bossu? ripostait Luxembourg, il ne m'a jamais vu par derrière!»--CLAUDE AUGÉ.