Le lendemain, Charles prit sa bonne à part et il lui dit:
«Solange, maman n'aime donc pas ma petite soeur?
—Oh! si, monsieur, elle l'aime beaucoup, au contraire.
—Mais elle ne lui dit rien et ne l'embrasse jamais!
—C'est qu'elle craint de vous faire de la peine; mais quand vous étiez au collège, elle passait sa journée à la caresser.
—Et pourquoi ne la caresse-t-elle pas devant moi?
—Vous avez donc oublié, monsieur Charles, que vous pleuriez quand madame embrassait sa fille, et que vous ne vouliez pas la souffrir à la maison?»
Charles, honteux de sa conduite passée, à laquelle il n'avait jamais réfléchi, courut à la chambre de sa belle-mère.
«Ah! petite mère, cria-t-il, que vous devez me détester! Comme j'étais méchant autrefois! Laissez-moi embrasser ma petite soeur, je vous en prie; caressez-la, chérissez-la, maman, et ne craignez pas que je pense ni ne dise aucune de ces vilaines choses qui ont forcé papa à me mettre au collège.»
Et en parlant ainsi il avait pris sa petite soeur dans ses bras et faisait mille enfantillages pour la faire rire. «Maman, je vous aiderai à bien aimer ma soeur; il faut même l'aimer plus que moi, car elle en a besoin; elle est si petite!»