Après avoir cherché le moyen de les emporter, je fabriquai une espèce
de civière sur laquelle nous les transportâmes jusqu’à notre retranchement
extérieur. Mais là, nous fûmes encore dans un grand embarras. Je n’avais
nulle envie d’abattre le rempart et ne voyais pas comment on pourrait les
faire passer par-dessus. Le seul parti qu’il y avait à prendre, c’était de
travailler à nouveau. Avec l’aide de Vendredi, je dressai, en moins de deux
heures, une jolie petite tente couverte de ramée et de vieilles voiles, et cela
entre mon retranchement extérieur et le bocage que j’avais planté près de
là. Dans cette hutte, je leur fis deux lits de quelques bottes de paille. Sur
chacun de ces lits je mis une couverture pour coucher dessus et une autre
pour donner la chaleur nécessaire.
Je me croyais alors riche en sujets et me considérais comme un
petit monarque. Toute cette île était mon domaine, mes sujets m’étaient
parfaitement soumis, j’étais leur Législateur et leur Seigneur. Ils m’étaient
tous redevables de la vie et tous étaient prêts à la risquer pour mon service
dès que l’occasion s’en présenterait.
Aventures de Robinson Crusoé
Daniel Defoe