HÉLÈNE.
Voilà ma fourmi; je la reconnais bien. Elle arrête toutes celles qu'elle rencontre. Voyez donc, elle les frappe avec ses deux petites cornes qu'elle remue comme elle veut, et les fourmis qu'elle a frappées ainsi vont toutes du côté de la mie de pain.
RAYMOND.
Est-ce que tu crois qu'elle leur parle?
HÉLÈNE.
Il le faut bien, puisqu'elles vont chercher la mie de pain.
SUZANNE.
Oh! que je voudrais donc savoir ce qu'elle leur dit! ce doit être drôle une fourmi qui parle!»
Toutes les fourmis que la première avait frappées s'étant dirigées du côté de la mie l'émiettèrent pour l'emporter.
HÉLÈNE.
«En voilà une qui est bien complaisante! voyez donc quelle peine elle se donne pour aider à l'autre!
RAYMOND.
J'aime bien mieux celle qui vient de se laisser tomber du haut de cette pierre, sans quitter là mie qu'elle tient entre ses pattes; car, moi, j'aime le courage! ajouta le petit garçon en se grandissant.
HÉLÈNE.
Moi, je préfère la bonté.
SUZANNE.
Moi, j'aime mieux maman.»
Les trois enfants se levèrent enfin pour retourner chez eux; mais ils sortirent, sans s'en apercevoir, du côté opposé à celui par lequel ils étaient entrés. Ils trouvèrent des fleurs nouvelles et les cueillirent.
HÉLÈNE.
«Oh! quel beau pied d'oeillets sur la pente de ce rocher!
SUZANNE.
Je les veux pour maman qui les aime tant!
RAYMOND.
Tu les auras, Suzanne. Mesdemoiselles, je vais m'étendre sur la roche, et vous me tiendrez chacune par une jambe.
HÉLÈNE.
Monsieur, je n'entends pas cela; je ne souffrirai pas que vous alliez jusqu'à cette touffe d'oeillets qui est sur le bord du précipice, parce que vous tomberiez. Que dirait maman! et c'est si creux de l'autre côté, que les vaches qui sont dans le bas ne paraissent pas plus grandes que ma chatte.
SUZANNE.