—Mais Jules ne demandera pas mieux que de s'amuser!
—Comme il voudra,» répondit sa mère.
Jules fut enchanté d'aller au bal, car il avait déjà seize ans. Sa mère et sa tante s'occupèrent de sa toilette. A dîner, il demanda plusieurs fois s'il était bien vrai que personne de la maison ne viendrait au bal, et parut fort content quand on l'assura qu'aucun d'eux ne l'accompagnerait; cette instance inquiéta tante Monique.
Tout le monde était couché chez l'épicier, quand on frappa à coups redoublés à la porte. Longuet se leva pour ouvrir. Monique, qui ne dormait que d'un oeil, entendant qu'on parlait haut et fort, s'habilla à moitié, et descendit pour savoir ce qui était arrivé. Elle trouva le jeune marié, aux noces duquel Jules était allé, tenant celui-ci au collet et disant à l'épicier:
«Vous avez beau dire, cousin, c'est Jules qui m'a volé mon épingle. Voyez-la plutôt à sa cravate!»
Jules, écrasé par la honte et le remords, ne disait mot. Le malheureux épicier supplia son jeune parent de ne pas ébruiter la chose; mais elle était déjà connue de tout le monde, car, au bal, le marié avait vu son épingle au cou de Jules, et lui avait dit en plaisantant:
«Il paraît que tu as voulu me jouer un tour! Allons, rends-moi mon épingle!»
Jules prétendit que l'épingle était bien à lui, puisque tante Monique la lui avait donnée, et que d'ailleurs il y avait plus d'une épingle semblable dans le monde.
«Nous allons voir, dit le marié; j'ai fait sauter une pierre bleue de mon épingle en la mettant précipitamment pour aller me marier. Voyons si la tienne a bien toutes ses pierres?»
La pierre bleue manquait aussi à l'épingle de Jules; ce fut alors que le cousin le ramena chez M. Longuet.
Le père enferma son fils à clef dans sa chambre, et passa le reste de la nuit à se désespérer.
Le lendemain, tante Monique porta, vers midi, de la soupe à Jules. Elle le trouva fort pâle; il ne s'était pas couché et pleurait beaucoup.
«Oh! ma bonne tante, s'écria-t-il, ayez pitié de moi!