Sylvine s'empressa d'allumer son feu pour faire chauffer un peu de lait à l'enfant qu'elle avait déposé sur son lit; mais il ne se réveilla pas du reste de la nuit.
Le lendemain, René, en ouvrant les yeux, demanda sa mère; Sylvine lui dit qu'il irait la voir dans la journée. Elle le leva, puis lui donna une grande jatte de lait chaud; après l'avoir bue, il eut un morceau de pain blanc et une grappe de raisin bien doré. La bonne femme conduisit alors l'enfant dans la cour, où il resta pendant qu'elle faisait son ménage. Le mari jeta du grain aux volailles, et le petit René se divertit beaucoup à les voir picoter leur nourriture; c'étaient surtout les pigeons qui lui plaisaient! Mais de temps en temps il se mettait à pleurer en disant: «Où est donc maman?» Et Sylvine le consolait en lui répétant: «Tu la reverras bientôt.»
Après le déjeuner où l'enfant, pensant toujours à sa mère, ne mangea pas beaucoup, Sylvine, le prenant dans ses bras, s'en alla porter le reste du pain blanc à son père, qui demeurait dans le village, chez son fils aîné. Le vieillard était assis à la porte, sur un banc ombragé d'une treille. Du plus loin qu'il vit venir sa fille, il lui dit:
«Sylvine, où as-tu donc pris cet enfant?
—Sur la grande route, mon cher père.»
Et elle lui raconta l'aventure de la nuit précédente.
«Ma fille, ses parents doivent être dans une inquiétude mortelle; il faut le leur reconduire sans retard.
—Mais où les trouver, mon père?
—Où demeures-tu, petit?
—Moi! je demeure à Metz.
—Ah! mon Dieu, s'écria le vieillard; c'est très-loin d'ici. Mais où allais-tu donc, mon enfant?
—J'allais chez grand-père.
—Où demeure-t-il donc, ton grand-père?
—Il demeure dans une belle maison au milieu d'un jardin, bien loin de la ville.»