CHAPITRE XI Qui a volé les tartes ? (1)
Le Roi et la Reine de Cœur étaient assis sur leur trône, entourés d’une
nombreuse assemblée : toutes sortes de petits oiseaux et d’autres bêtes, ainsi
que le paquet de cartes tout entier. Le Valet, chargé de chaînes, gardé de
chaque côté par un soldat, se tenait debout devant le trône, et près du roi
se trouvait le Lapin Blanc, tenant d’une main une trompette et de l’autre
un rouleau de parchemin. Au beau milieu de la salle était une table sur
laquelle on voyait un grand plat de tartes ; ces tartes semblaient si bonnes
que cela donna faim à Alice, rien que de les regarder. « Je voudrais bien
qu’on se dépêchât de finir le procès, » pensa-t-elle, « et qu’on fît passer les
rafraîchissements, » mais cela ne paraissait guère probable, aussi se mit-elle
à regarder tout autour d’elle pour passer le temps.
C’était la première fois qu’Alice se trouvait dans une cour de justice, mais
elle en avait lu des descriptions dans les livres, et elle fut toute contente de
voir qu’elle savait le nom de presque tout ce qu’il y avait là. « Ça, c’est le
juge, » se dit-elle ; « je le reconnais à sa grande perruque. »
Le juge, disons-le en passant, était le Roi, et, comme il portait sa
couronne par-dessus sa perruque (regardez le frontispice, si vous voulez
savoir comment il s’était arrangé) il n’avait pas du tout l’air d’être à son aise,
et cela ne lui allait pas bien du tout.