C’était le Lapin Blanc qui revenait en trottinant, et qui cherchait de
tous côtés, d’un air inquiet, comme s’il avait perdu quelque chose ; Alice
l’entendit qui marmottait : « La Duchesse ! La Duchesse ! Oh ! mes pauvres
pattes ; oh ! ma robe et mes moustaches ! Elle me fera guillotiner aussi vrai
que des furets sont des furets ! Où pourrais-je bien les avoir perdus ? » Alice
devina tout de suite qu’il cherchait l’éventail et la paire de gants paille, et,
comme elle avait bon cœur, elle se mit à les chercher aussi ; mais pas moyen
de les trouver.
Du reste, depuis son bain dans la mare aux larmes, tout était changé : la
salle, la table de verre, et la petite porte avaient complètement disparu.
Bientôt le Lapin aperçut Alice qui furetait ; il lui cria d’un ton
d’impatience : « Eh bien ! Marianne, que faites-vous ici ? Courez vite à la
maison me chercher une paire de gants et un éventail ! Allons, dépêchonsnous. »
Alice eut si grand-peur qu’elle se mit aussitôt à courir dans la direction
qu’il indiquait, sans chercher à lui expliquer qu’il se trompait.
« Il m’a pris pour sa bonne, » se disait-elle en courant. « Comme il sera
étonné quand il saura qui je suis ! Mais je ferai bien de lui porter ses gants
et son éventail ; c’est-à-dire, si je les trouve. » Ce disant, elle arriva en face
d’une petite maison, et vit sur la porte une plaque en cuivre avec ces mots,
« JEAN LAPIN. » Elle monta l’escalier, entra sans frapper, tout en tremblant
de rencontrer la vraie Marianne, et d’être mise à la porte avant d’avoir trouvé
les gants et l’éventail.