CHAPITRE IV L’habitation du Lapin Blanc (4)
« Oh ! Alice, petite folle, » se répondit-elle. « Comment pourriez-vous
apprendre des leçons ici ? Il y a à peine de la place pour vous, et il n’y en
a pas du tout pour vos livres de leçons. »
Et elle continua ainsi, faisant tantôt les demandes et tantôt les réponses,
et établissant sur ce sujet toute une conversation ; mais au bout de quelques
instants elle entendit une voix au-dehors, et s’arrêta pour écouter.
« Marianne ! Marianne ! » criait la voix ; « allez chercher mes gants
bien vite ! » Puis Alice entendit des piétinements dans l’escalier. Elle savait
que c’était le Lapin qui la cherchait ; elle trembla si fort qu’elle en ébranla
la maison, oubliant que maintenant elle était mille fois plus grande que le
Lapin, et n’avait rien à craindre de lui.
Le Lapin, arrivé à la porte, essaya de l’ouvrir ; mais, comme elle s’ouvrait
en dedans et que le coude d’Alice était fortement appuyé contre la porte, la
tentative fut vaine. Alice entendit le Lapin qui murmurait : « C’est bon, je
vais faire le tour et j’entrerai par la fenêtre. »
« Je t’en défie ! » pensa Alice. Elle attendit un peu ; puis, quand elle crut
que le Lapin était sous la fenêtre, elle étendit le bras tout à coup pour le
saisir ; elle ne prit que du vent. Mais elle entendit un petit cri, puis le bruit
d’une chute et de vitres cassées (ce qui lui fit penser que le Lapin était tombé
sur les châssis de quelque serre à concombre), puis une voix colère, celle
du Lapin : « Patrice ! Patrice ! où es-tu ? » Une voix qu’elle ne connaissait
pas répondit : « Me v’là, not’maître ! J’bêchons la terre pour trouver des
pommes ! »