【Emile Zola】Le Ventre de Paris III (71)
– Est-ce qu’on sait, dit-elle, avec ces enfants mal élevés !… Celui-ci a
de si mauvais exemples sous les yeux, que je ne suis pas tranquille, quand
il est avec ma fille.
L’enfant avait sept ans. Mademoiselle Saget, qui se trouvait là, ajouta :
– Vous avez bien raison. Il est toujours fourré avec les petites du quartier,
ce garnement… On l’a trouvé dans une cave, avec la fille du charbonnier.
La belle Normande, quand Muche vint en pleurant lui raconter l’aventure,
entra dans une colère terrible. Elle voulait aller tout casser chez les QuenuGradelle.
Puis, elle se contenta de donner le fouet à Muche.
– Si tu y retournes jamais, cria-t-elle, furieuse, tu auras affaire à moi !
Mais la véritable victime des deux femmes était Florent. Au fond, lui seul
les avait mises sur ce pied de guerre, elles ne se battaient que pour lui. Depuis
son arrivée, tout allait de mal en pis ; il compromettait, fâchait, troublait ce
monde qui avait vécu jusque-là dans une paix si grasse. La belle Normande
l’aurait volontiers griffé, quand elle le voyait s’oublier trop longtemps chez
les Quenu ; c’était pour beaucoup l’ardeur de la lutte qui la poussait au
désir de cet homme. La belle Lisa gardait une attitude de juge, devant
la mauvaise conduite de son beau-frère, dont les rapports avec les deux
Méhudin faisaient le scandale du quartier. Elle était horriblement vexée ;
elle s’efforçait de ne pas montrer sa jalousie, une jalousie particulière, qui,
malgré son dédain de Florent et sa froideur de femme honnête, l’exaspérait,
chaque fois qu’il quittait la charcuterie pour aller rue Pirouette, et qu’elle
s’imaginait les plaisirs défendus qu’il devait y goûter.