【法语版】L'île au trésor 金银岛 III (1)
III La marque noire (1)
Vers midi, je remontai chez le Capitaine avec des boissons
rafraîchissantes et les médicaments prescrits par le docteur. Le malade était
couché à peu près comme nous l’avions laissé, un peu plus haut peut-être
sur son oreiller, et il semblait à la fois affaibli et excité.
« Jim, me dit-il, tu es le seul ici qui vaille quelque chose et j’ai toujours
été bon pour toi, tu le sais… Chaque mois, je t’ai donné une belle pièce de
quatre pence… Maintenant que me voilà au bassin du carénage, abandonné
de tout le monde, tu ne me refuseras pas un verre de rhum, n’est-ce pas,
camarade ?
– Vous savez bien que le docteur… » commençai-je…
Mais il me coupa la parole en envoyant le docteur à tous les diables, avec
ce qui lui restait de voix dans la gorge.
« Les médecins sont de vieux fauberts, criait-il… Et celui-ci, est-ce qu’il
peut rien comprendre aux gens de mer ? je te le demande… Moi qui te parle,
je me suis vu dans des endroits où il faisait plus chaud qu’au fond d’un four,
où tout le monde crevait de la fièvre jaune, où la terre elle-même se soulevait
en forme de vagues par l’effet des tremblements de terre ; est-ce que ton
docteur a jamais rien vu de pareil ? Et je me tirais d’affaire grâce au rhum,
au rhum tout seul. Le rhum était mon pain, mon vin, mon pays, mon ami,
mon tout. Et maintenant que me voilà sur le flanc, comme une pauvre vieille
carcasse de navire, on voudrait me priver de rhum… ! Si tu prêtais la main
à une chose pareille, Jim, ce serait m’assassiner, ni plus ni moins. Mon sang
retomberait sur ta tête, tu peux en être certain, et sur celle de ce veau marin
de docteur… »