« Ah ! » se dit Alice, « c’est donc Jacques qui va descendre. Il paraît
qu’on met tout sur le dos de Jacques. Je ne voudrais pas pour beaucoup être
Jacques. Ce foyer est étroit certainement, mais je crois bien que je pourrai
tout de même lui lancer un coup de pied. »
Elle retira son pied aussi bas que possible, et ne bougea plus jusqu’à ce
qu’elle entendît le bruit d’un petit animal (elle ne pouvait deviner de quelle
espèce) qui grattait et cherchait à descendre dans la cheminée, juste audessus d’elle ;
alors se disant : « Voilà Jacques sans doute, » elle lança un
bon coup de pied, et attendit pour voir ce qui allait arriver.
La première chose qu’elle entendit fut un cri général de : « Tiens, voilà
Jacques en l’air ! » Puis la voix du Lapin, qui criait : « Attrapez-le, vous là-
bas, près de la haie ! » Puis un long silence ; ensuite un mélange confus de
voix : « Soutenez-lui la tête. – De l’eau-de-vie maintenant. – Ne le faites pas
engouer. – Qu’est-ce donc, vieux camarade ? – Que t’est-il arrivé ? Racontenous ça ! »
Enfin une petite voix faible et flûtée se fit entendre. (« C’est la voix de
Jacques, » pensa Alice.) « Je n’en sais vraiment rien. Merci, c’est assez ; je
me sens mieux maintenant ; mais je suis encore trop bouleversé pour vous
conter la chose. Tout ce que je sais, c’est que j’ai été poussé comme par un
ressort, et que je suis parti en l’air comme une fusée. »
« Ça, c’est vrai, vieux camarade, » disaient les autres.
« Il faut mettre le feu à la maison, » dit le Lapin.
Alors Alice cria de toutes ses forces : « Si vous osez faire cela, j’envoie
Dinah à votre poursuite. »