【Emile Zola】Le Ventre de Paris I (34)
– Bonjour, monsieur Claude, répondit gaiement la maraîchère. Vous
savez, je vous ai attendu, lundi ; et comme vous n’êtes pas venu, j’ai garé
votre toile ; je l’ai accrochée à un clou, dans ma chambre
– Vous êtes trop bonne, madame François, j’irai terminer mon étude,
un de ces jours... Lundi, je n’ai pas pu... Est-ce que votre grand prunier a
encore toutes ses feuilles ?
– Certainement.
– C’est que, voyez-vous, je le mettrai dans un coin du tableau. Il fera
bien, à gauche du poulailler. J’ai réfléchi à ça toute la semaine... Hein ! les
beaux légumes, ce matin. Je suis descendu de bonne heure, me doutant qu’il
y aurait un lever de soleil superbe sur ces gradins de choux.
Il montrait du geste toute la longueur du carreau. La maraîchère reprit :
– Eh bien, je m’en vais. Adieu... À bientôt, monsieur Claude !
Et comme elle partait, présentant Florent au jeune peintre :
– Tenez, voilà monsieur qui revient de loin, paraît-il. Il ne se reconnaît
plus dans votre gueux de Paris. Vous pourriez peut-être lui donner un bon
renseignement.
Elle s’en alla enfin, heureuse de laisser les deux hommes ensemble.
Claude regardait Florent avec intérêt ; cette longue figure, mince et flottante,
lui semblait originale. La présentation de madame François suffisait ; et,
avec la familiarité d’un flâneur habitué à toutes les rencontres de hasard, il
lui dit tranquillement ;