【Emile Zola】Le Ventre de Paris I (50)
Et, quand il revenait au carrefour, il était sollicité par d’autres enseignes,
des Droguerie et pharmacie, des Farines et légumes secs, aux grosses
majuscules rouges ou noires, sur des fonds déteints. Les maisons des angles,
à fenêtres étroites, s’éveillaient, mettaient, dans l’air large de la nouvelle rue
du Pont-Neuf, quelques jaunes et bonnes vieilles façades de l’ancien Paris.
Au coin de la rue Rambuteau, debout au milieu des vitrines vides du grand
magasin de nouveautés, des commis bien mis, en gilet, avec leur pantalon
collant et leurs larges manchettes éblouissantes, faisaient l’étalage. Plus
loin, la maison Guillout, sévère comme une caserne, étalait délicatement,
derrière ses glaces, des paquets dorés de biscuits et des compotiers pleins de
petits-fours. Toutes les boutiques s’étaient ouvertes. Des ouvriers en blouses
blanches, tenant leurs outils sous le bras, pressaient le pas, traversaient la
chaussée.
Claude n’était pas descendu de son banc. Il se grandissait, pour voir
jusqu’au fond des rues. Brusquement, il aperçut, dans la foule qu’il dominait,
une tête blonde aux larges cheveux, suivie d’une petite tête noire, toute
crépue et ébouriffée.
– Eh ! Marjolin ! eh ! Cadine ! cria-t-il.
Et, comme sa voix se perdait au milieu du brouhaha, il sauta à terre, il
prit sa course. Puis, il songea qu’il oubliait Florent ; il revint d’un saut ; il
dit rapidement :
– Vous savez, au fond de l’impasse des Bourdonnais... Mon nom est
écrit à la craie sur la porte, Claude Lantier... Venez voir l’eau-forte de la
rue Pirouette.