Le premier matin, lorsque Florent arriva à sept heures, il se trouva
perdu, les yeux effarés, la tête cassée. Autour des neuf bancs de criée,
rôdaient déjà des revendeuses, tandis que les employés arrivaient avec leurs
registres, et que les agents des expéditeurs, portant en sautoir des gibecières
de cuir, attendaient la recette, assis sur des chaises renversées, contre les
bureaux de vente. On déchargeait, on déballait la marée, dans l’enceinte
fermée des bancs, et jusque sur les trottoirs. C’était, le long du carreau,
des amoncellements de petites bourriches, un arrivage continu de caisses
et de paniers, des sacs de moules empilés laissant couler des rigoles d’eau.
Les compteurs-verseurs, très affairés, enjambant les tas, arrachaient d’une
poignée la paille des bourriches, les vidaient, les jetaient, vivement ; et, sur
les larges mannes rondes, en un seul de coup de main, ils distribuaient les
lots, leur donnaient une tournure avantageuse. Quand les mannes s’étalèrent,
Florent put croire qu’un banc de poissons venait d’échouer là, sur ce trottoir,
râlant encore, avec les nacres roses, les coraux saignants, les perles laiteuses,
toutes les moires et toutes les pâleurs glauques de l’Océan.