【Emile Zola】Le Ventre de Paris III (63)
Un soir que sa sœur invita le professeur à dîner, elle fit sa cuisine sur le
carré et mangea dans sa chambre. Souvent, elle s’enfermait si étroitement,
qu’on ne la voyait pas d’une semaine. Elle restait molle toujours, avec des
caprices de fer, des regards de bête méfiante, sous sa toison fauve pâle. La
mère Méhudin, qui crut pouvoir se soulager avec elle, la rendit furieuse en
lui parlant de Florent. Alors, la vieille, exaspérée, cria partout qu’elle s’en
irait, si elle n’avait pas peur de laisser ses deux filles se manger entre elles.
Comme Florent se retirait, un soir, il passa devant la porte de Claire,
restée grande ouverte. Il la vit très rouge, qui le regardait. L’attitude hostile
de la jeune fille le chagrinait ; sa timidité avec les femmes l’empêchait
seule de provoquer une explication. Ce soir-là, il serait certainement entré
dans sa chambre, s’il n’avait aperçu, à l’étage supérieur, la petite face
blanche de mademoiselle Saget, penchée sur la rampe. Il passa, et il n’avait
pas descendu dix marches, que la porte de Claire, violemment refermée
derrière son dos, ébranla toute la cage de l’escalier. Ce fut en cette occasion
que mademoiselle Saget se convainquit que le cousin de madame Quenu
couchait avec les deux Méhudin.