【Emile Zola】Le Ventre de Paris III (91)
Quand les trois femmes furent sur le trottoir, elles convinrent que la
belle Lisa avait fait une drôle de mine. Tout ça, le cousin, les Méhudin,
Gavard, le Quenu, avec leurs histoires auxquelles personne ne comprenait
rien, ça finirait mal. Madame Lecœur demanda ce qu’on faisait des gens
arrêtés « pour la politique. » Mademoiselle Saget savait seulement qu’ils ne
paraissaient plus, plus jamais ; ce qui poussa la Sarriette à dire qu’on les
jetait peut-être à la Seine, comme Jules le demandait.
La charcutière, au déjeuner et au dîner, évita toute allusion. Le soir, quand
Florent et Quenu s’en allèrent chez monsieur Lebigre, elle ne parut pas avoir
plus de sévérité dans les yeux. Mais justement, ce soir-là, la question de la
prochaine constitution fut débattue, et il était une heure du matin, lorsque
ces messieurs se décidèrent à quitter le cabinet ; les volets étaient mis, ils
durent passer par la petite porte, un à un, en arrondissant l’échine. Quenu
rentra, la conscience inquiète. Il ouvrit les trois ou quatre portes du logement,
le plus doucement possible, marchant sur la pointe des pieds, traversant
le salon, les bras tendus, pour ne pas heurter les meubles. Tout dormait.