【法语版】L'île au trésor XIV (7)
XIV Le premier coup(7)
Sans perdre une seconde, je me dégageai des branches qui m’entouraient,
avec aussi peu de bruit que possible, et je me remis à ramper vers la grande
clairière. Tout en fuyant, j’entendais les appels du vieux forban et de ses
camarades, et il n’en fallait pas plus pour me donner des ailes. Dès que je
me vis hors du taillis, je me mis à courir comme je n’ai jamais couru, sans
m’occuper de la direction que je prenais, pourvu qu’elle fût en sens contraire
de celles des assassins. Et à mesure que je courais, ma peur grandissait au
point de devenir une frénésie.
Et en vérité, était-il possible de se trouver dans un plus grand danger ? Au
coup de canon de retraite, comment oser rejoindre aux canots ces démons
encore fumants de leur crime ? Le premier qui m’apercevrait n’allait-il pas
me tordre le cou comme à une bécasse ? Mon absence même ne disait-elle
pas mes alarmes et par conséquent mes soupçons ?… C’est fini, me disaisje.
Adieu à l’Hispaniola ! Adieu au squire, au docteur, au capitaine ! Il n’y
a plus pour moi que la mort, par la faim ou par les mains des révoltés…
Tout en faisant ces amères réflexions, je courais toujours et j’étais arrivé
sans m’en apercevoir au pied d’une des collines, dans cette partie de l’île
où les chênes verts poussaient moins drus et plus semblables à des arbres de
forêt. Quelques pins assez hauts s’y montraient aussi. L’air était plus frais
et plus pur qu’en bas, dans le marécage.
C’est là qu’une nouvelle alarme m’arrêta court et me tint immobile, le
cœur battant à se rompre.