【法语版】L'île au trésor XXIV(3)
XXIV Le voyage de la pirogue(3)
Trempé et terrifié, je retombai sans plus tarder dans mon attitude
première. Sur quoi, la pirogue retrouva immédiatement son équilibre et se
remit à me porter aussi doucement qu’auparavant parmi les vagues. Je vis
bien qu’il ne fallait pas songer à la guider. Et alors quel espoir me restaitil
de jamais regagner la terre ?
Une frayeur nouvelle s’empara de moi. Malgré tout, pourtant, je ne perdis
pas la tête. D’abord, en prenant soin d’éviter tout mouvement brusque,
je commençai par vider le bateau, avec mon bonnet, de l’eau qu’il avait
embarquée ; puis, replaçant mon œil au niveau du bord, je me mis à étudier
comment s’arrangeait mon esquif pour naviguer si tranquillement sur une
si grosse mer
Je remarquai alors que chaque vague, au lieu d’être la montagne lisse
qu’elle paraît être du rivage, ou du pont d’un navire, ressemble parfaitement
à une véritable montagne terrestre, avec ses pics, ses plateaux et ses vallées.
La pirogue abandonnée à elle-même, tournait en rencontrant le moindre
obstacle, enfilait pour ainsi dire son chemin dans ces vallées, évitait les
pentes raides, les précipices et les pics sourcilleux.
« Il est donc évident, me disais-je, qu’il faut rester couché comme je le
suis, pour ne pas déranger l’équilibre ; mais il est clair aussi que je puis
mettre ma pagaie en dehors et, de temps en temps, dans les endroits bien
choisis, donner à la pirogue une impulsion vers la terre. »