【法语版】L'île au trésor XXVII (3)
XXVII « Pièces de huit ! » (3)
J’étais maintenant absolument seul à bord. La marée commençait à
redescendre, et le soleil était déjà si bas sur l’horizon que les pins de la rive
gauche allongeaient leur ombre presque sur le pont du schooner. La brise
du soir se levait, et, quoique bien abrités par la colline et les pins de l’Est,
les cordages se mettaient à gémir doucement et les voiles à palpiter. Cela
pouvait devenir un danger pour le navire. Aussi m’empressai-je de courir
aux deux focs et de les abattre. Mais la voile de misaine était plus difficile à
manier. Son boute-hors avait naturellement suivi le mouvement du schooner,
au moment où il tombait sur le flanc, et trempait maintenant dans l’eau avec
deux ou trois pieds de toile. Je pensais bien que cette circonstance même
rendait mon intervention plus nécessaire ; mais la tension de la voile sous
l’action de la brise était déjà si forte que je n’osais plus entamer la lutte. Je
me déterminai à tirer mon couteau et à couper les drisses. Tout s’abattit à la
fois, et une bonne moitié de la voile, tombant à la surface de l’eau, y forma
une masse flottante par l’effet de l’air qui se trouvait emprisonné ; j’eus
beau tirer de toutes mes forces, il me fut impossible de la ramener à bord.
J’y renonçai donc. J’avais fait tout ce qui dépendait de moi, et l’Hispaniola
devait maintenant s’en remettre à sa bonne étoile.